Total Remake : mémoires courtes
Le titre gentiment moqueur, voilà qui est fait. Il faut dire que c'est un peu l'occasion rêvée de parler d'un sujet plus que jamais d'actualité à Hollywood : la mode des remakes et reboots. Ceci ayant déjà été débattu et expliqué à de nombreuses reprises, je me contenterai de graviter autour de Verhoeven, puisque vous vous doutez bien que la comparaison sera inévitable. Vous êtes prévenus, cette critique sera plutôt courte car il y a finalement peu à dire sur ce film (ce qui n'est pas en soi un mauvais signe).
Paul Verhoeven, illustre dynamiteur de l'industrie hollywoodienne dans les années 90 à coup de blockbusters subversifs au possible, a vu son patrimoine pillé de façon assez ironique. Tous les films de période américaine, sauf Showgirls pour cause de bide monumental, ont maintenant eu droit a des suites ou des remakes de qualité pour le moins variable. Pour le "plaisir" de les rappeller, cela donne tout de même : Robocop (suite ET remake en vue), Total Recall, Basic Instinct, Starship Troopers et Hollow Man. Sachant qu'il n'a lui même réalisé aucun de ces dérivés, on peut bien parler d'exploitation juteuse de ses succès.
Je ne crache pas non plus sur le principe sans discernement, le remake de Robocop m'intéresse énormément pour la simple raisons qu'il est entre de bonnes mains. Après l'abandon de Darren Aronofsky, c'est José Padilha, réalisateur du film choc Troupes d'élite, et dont la vision du fameux robot et de la justice peuvent se révéler très intéressantes une fois transposées dans un futur proche états-unien. L'énorme problème que me posait ce Total Recall, outre la difficulté de réadapter un tel scénario, était la présence de Len Wiseman derrière la caméra. Après avoir lancé la saga Underworld, réalisé son infâme second opus et un quatrième Die Hard pas fin pour deux sous, je n'attendais strictement rien de ce remake.
Et le film laisse craindre le pire avec son introduction, séquence de rêve sacrément mal filmé et pas inspirée, avec tout plein de lumière qui bavent à travers tout l'écran façon photo prise à l'arrache (dans d'autres films c'est artistiques mais, là vraiment, non). Puis lentement, le tout se met en place, on a quelques scènes de dialogue purement fonctionnelles pour mettre en place l'intrigue, on râle un peu que les acteurs soient moins bon que dans l'orginal, mais ça commence à tourner tranquillement façon vieux diesel.
On sent qu'il y en a qui se sont fait plaisir à la conception, ceux qui ont imaginé et désigné la première ville ont bien fait leur boulot. On retrouve une forte inspiration de Blade Runner, mais vu que les deux sont adaptés de Philip K. Dick on ne peut pas dire que ce soit gênant. Au lieu d'avoir une distance Terre-Mars, ici c'est de l'Australie à l'Angleterre qu'il y a voyage, et même quotidien pour aller travailler. Pour faire bref, les pauvres sont parqués dans l'ancienne Australie et sont exploités comme ouvriers à la chaîne par la super puissance située de l'autre côté du globe, forte d'une gigantesque armée de robots que ces mêmes ouvriers doivent assembler.
L'élément perturbateur est bien évidemment la société Rekall et son offre alléchant de pouvoir vivre n'importe quel fantasme que l'on souhaite de façon purement mentale, et en théorie sans conséquence. A partir de cet instant où tout bascule, je ne vais pas spoiler plus le scénario pour ceux qui n'ont pas vu l'original, mais de toute façon ça devient vite assez différent. Que ce soit voulu ou par manque d'inspiration, pour moi ce qui fait la force du film est justement qu'il ne s'attache pas à raconter la même histoire, et ne prétend jamais être aussi intelligent.
Le point de départ n'est limite qu'un prétexte à nous servir 1h30 d'action, en gros le temps qu'il reste. De quoi faire hurler certains, mais j'ai trouvé cela plus judicieux, on voit de toute façon rapidement les limites niveau dialiogue et intrigue. Le film empile alors course poursuites délirantes, fusillades, bastons et explosions à gogo, avec un effort non négligeable sur la mise en scène si on compare aux précédentes réalisations de Wiseman.
Le film se laisse suivre sans peine, et sans ennui (si tant est que l'on accroche), le rythme étant plutôt très soutenu. La musique n'est pas très inspirée mais accompagne correctement l'action, sans être envahissante, du boulot correct en somme. Etonnamment, il n'y a pas tant de grosses incohérences que ça, à part sur la fin, mais ceci est largement contrebalancé par de la destruction massive qui suffit à leurer les quelques neurones que l'on avait pas pas posé à l'entrée.
Finalement, le plus gros défaut du film reste les acteurs, qui à part un Cranston qui prend sa pause annuelle de Breaking Bad pour gentiment cabotiner, le casting est terriblement lisse. Que dire de Beckinsale, qui ne serait jamais là si son mari n'était pas le réalisateur, comme une certaine Milla Jovovich avec Paul W.S. Anderson ? Dès le début elle fait preuve d'une absence de charisme catastrophique, et ce ne sont pas les poses pseudo badass au ralenti par la suite qui vont arranger ça.
En somme, voilà un bon gros blosckbuster estival à la surenchère constante digne d'un jeu vidéo, qui ne vise pas plus loin que divertir pendant deux heures, et c'est réussi. Pas une claque, loin de là, mais les bonnes surprises dans ce genre je suis toujours preneur.