L’histoire est étonnante et s’offre en mosaïque. Je vous donne le « pitch » qu’en donne Wikipedia et qui résume parfaitement la chose : « Depuis l’âge de huit ans, Thomas est persuadé — à tort ou à raison — d’avoir été échangé par erreur à sa naissance avec un autre bébé, son voisin Alfred Kant. La jalousie ressassée à l’égard de cet homme mieux loti lui a gâché toute son existence, parfois avec des conséquences tragiques pour ses proches. Il ne songe qu’à se venger et envisage même de tuer Alfred. Pourtant Thomas trouvera sur le tard une manière plus originale de donner un sens à sa vie ».
Entre ces allers retours incessants sur trois époques différentes, ces micro-scènes et ces nombreux stéréotypes bon marché, le film est indigeste, clinquant et beaucoup trop fonctionnel. C’est du Jeunet avant l’heure. Et en somme il fait partie de cette liste de films, avec Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, érigé en phénomène de leur époque et qui peinent à traverser le temps, pour reste poli – Mieux vaut ne pas les revoir ni les découvrir sur le tard. Lors de sa sortie à Cannes en 1991 Toto le héros est d’ailleurs récompensé par la caméra d’or, c’est qu’il proposait autre chose, sortait du lot. A l’époque. Il est plus délicat de voir ça aujourd’hui, tant le procédé de déconstruction narrative semble archi daté autant qu’il est impossible de savoir dans quelle ville se déroule l’action tant la mise en scène est laide, insignifiante.
Reste cet étonnant montage avec quelques bonnes idées, malgré tout, via certaines correspondances audacieuses, mais exploitées avec des sabots tellement imposants. Je n’ai pas vraiment d’exemples à donner, le film en fourmille. Je retiens essentiellement des enchainements forts, au détour de plans charnels, dans la partie enfantine. Mais c’est peu comparé à cet amas de mauvais goût traduit par une musique incessante aux ronflements insipides, un Michel Bouquet présent pour servir de caution de sortie tant il est inutile, et des étrangetés au niveau des doublures voix (En gros : la voix de Bouquet accompagne aussi le personnage jeune adulte et celle de Mireille Perrier couvre aussi celle d’Evelyne vieille) mais je ne vois pas trop leur intérêt. C’est comme beaucoup d’autres partis pris qui virent souvent au frisson de la honte et qui préfigurent ce que sera, en pire, Le huitième jour, cinq ans plus tard.