A tous les jouets que j'ai aimé avant.
Les adultes ne le savent peut-être pas mais les jouets profitent de notre inattention, de notre sommeil, de notre absence, pour prendre vie, pour vaquer tranquillement à leurs occupations. Non, je ne prends pas de LSD, je suis tout simplement attentif à ce qu'il se passe autour de moi. Je vous assure qu'une Barbie au boulot à bougé la tête d'un micro centimètre vers la droite, profitant que je faisais les lacets d'un marmot. Je ne sais vraiment pas pourquoi mais depuis on m'appelle "le dingue". Mais un jour, un jour mes amis, j'aurais la preuve de ce que j'avance. En attendant, je me contente de graduer le sol à la craie et de filmer la salle de jeux en permanence. On ne sait jamais.
Premier long-métrage entièrement conçu en images de synthèses, "Toy story" est une révolution technique, un pavé dans la mare, coproduction entre Disney et Pixar d'après le court-métrage "Tin Toy" réalisé en 1988. Mis en scène par John Lasseter, le film changera à jamais le monde de l'animation et du cinéma, précipitant malgré lui la mort de l'animation traditionnelle, un peu à l'image d'un Spileberg qui enterra la stop-motion avec son "Jurassic Park".
Formellement ahurissant pour l'époque, "Toy story" a bien évidemment subit les ravages du temps et pourra paraître un poil trop géométrique par rapport aux productions actuelles. Mais à la différence de beaucoup de ses concurrents, le film de John Lasseter ne mise pas tout sur sa forme, comprenant bien qu'elle sera de toute façon dépassée un jour ou l'autre. Ce qui différencie "Toy story" de ses futurs camarades, c'est bien entendu son coeur.
Fable sur la magie de l'enfance, sur la puissance de l'imagination, "Toy story" nous embarque pour un mini road-movie aussi drôle que touchant, une escapade filmée à hauteur de jouets où les parents n'ont pratiquement pas leur place, un microcosme régie par des règles finalement peu éloigné de notre monde. Lasseter et ses scénaristes retranscrivent à ce sujet parfaitement la dynamique de groupe, la jalousie, la suspicion et les luttes de pouvoir qui gangrènent toute communauté.
Nous faisons ainsi connaissance avec certains des personnages les plus attachants de l'univers Disney, à commencer par le duo vedette Woody / Buzz, l'un vieux cowboy tentant de retrouver sa place de leader, l'autre jouet qui s'ignore se prenant pour un vrai ranger de l'espace. Des protagonistes incroyablement vivants, avec leur complexité et leurs névroses, que l'on ne peut qu'aimer du fond du coeur. Gravitent autour d'eux des seconds rôles tout aussi savoureux, versions à peine déformées des jouets que nous avons pu avoir dans notre enfance. On saluera au passage l'excellent travail sur le doublage, sans qui le résultat n'aurait pas été le même.
Comprenant parfaitement l'importance du jouet fétiche dans la construction de l'enfant (au même titre qu'un doudou), "Toy story" est une ode à ces petits bouts de peluches et de plastiques qui auront accompagné notre enfance (et dont on se détachera égoïstement, comme le montre le personnage de Sid, double maléfique d'Andy), une petite merveille d'humour et d'émotion au rythme trépidant qui fit entrer le studio à la lampe sauteuse dans la cour des grands.