"Traffic" serait un film presque parfait (maîtrise de la réalisation, interprétation saisissante, grande intelligence de la dramaturgie), si ce n'était une tendance à l'hyper-centisme américain, vaguement nauséabond : "Traffic" se clôt ainsi sur l'habituelle célébration de la réconciliation familiale dans un contexte religieux, et sur un plan lénifiant explicitant comment l'argent américain peut être utilisé pour "sauver" les enfants mexicains, grâce au base ball, bien entendu... Ces bémols exceptés, il faut bien reconnaître qu'avec ce film, Soderbergh avait atteint son pinacle technique : sans ostentation, sans frénésie, avec de petits effets de caméra et quelques conventions de lumière (d'ailleurs un peu discutables) pour guider le spectateur dans le labyrinthe des fictions entremêlées, en enchaînant les scènes essentiellement au son, il nous raconte LA grande et passionnante - même si vraiment pas très belle - histoire de notre temps, celle du commerce de la drogue. Ce n'est pas rien : à date, "Traffic" reste d'ailleurs le plus bel exemple (le seul ?) de réussite d'un film commercial abordant un thème aussi ambitieux sans le simplifier - puisque ici, même si c'est polémique, Soderbergh aborde frontalement le thème de la "demande" autant que celui de "l'offre", ni le transformer en spectacle. [Critique écrite en 2001, complétée en 2016]