Inspiré d'une histoire vraie, le film de Rohmer évoque, au cours des années Front Populaire jusqu'à celles de l'Occupation, l'activité mystérieuse de Fiodor, un russe blanc anti-stalinien oeuvrant, peut-être, à des missions d'espionnage.
Rohmer étant ce qu'il est, on imagine bien que "Triple agent" n'est pas de la famille des James Bond! Pour l'essentiel, l'existence parisienne de Fiodor se dévoile au long de scènes intimistes et domestiques, à travers ce que cet homme apparemment sincère veut bien en dire à son épouse Arsinoé. Pour autant, celle-ci en viendra, tout comme le spectateur, à douter légitimement de son mari.
L'intérêt que Rohmer porte à ce personnage de Fiodor, parlant bien et posant en démocrate, c'est ce secret derrière lequel on peut envisager de la duplicité, le mensonge ou, pourquoi pas, de la mythomanie.
Moins vivant et séduisant que les contes moraux ou sentimentaux de son auteur, "Triple agent" est un film un peu austère, discursif (sans surprise), confiné dans des scènes d'intérieur où les textes littéraires du cinéaste (Fiodor le russe et Arsinoé la grecque parlent, étonnamment, un français d'académicien) introduisent des idées...littéraires en même temps qu'une interprétation figée et par moments factice.
Toutefois, ce n'est pas tant le style rohmérien qui me gêne que le sujet tel que le réalisateur a choisi de le présenter. Son intrigue ne porte aucun suspense, encore moins d'action -même si le dénouement est intéressant- et surtout aucune perspective. On s'ennuie parce que le film n'offre pas d'émotion ni de construction dramatique.