Drowning By Numbers est à la croisée des chemins. Ou des saisons. L'histoire sans fin du temps qui s'écoule vers une mort certaine et toujours naturelle. Que l'on compte les moutons, les étoiles ou les drames, les secondes ou les heures, rien ne saurait perturber le paisible cours du fleuve de la vie.
L'été peine à quitter le champ, refait surface au détour d'un rayon de soleil, d'une verte prairie ou d'une chaude nuit. Mais c'est l'automne qui s'installe. Souverain. Et avec lui le changement, la fin de l'acceptation et du déni. L'été endort les coeurs lascifs, abandonne ses victimes dans une douce torpeur, ferme les yeux de la justice. Quand l'automne rigoureux sonne l'heure du jugement dernier.
Gloire en ce jour aux natures mortes de l'artiste. Poétique en diable, inspiré comme rarement. Ô sauvages mantes religieuse, ô tristes sacrifiés, ô lugubre pénombre, votre beauté n'a d'égale que votre simplicité. Décevante simplicité. Surexplication et transparence, artifices indignes du maître de l'obscur.
Je te renie, l'artiste, car je t'ai compris.
Quel besoin, demandons-nous, de si piètres échanges, de si futiles propos? Quand l'évanescente splendeur d'un éternel instant comblait assurément l'esthète tapit en notre sein.
Tais-toi donc, imbécile, maudit sbire de la loi. Laisse voler ma pensée, épargne mon imaginaire. Il y a tant à rêver dans ces plans à la troublante profondeur, lorsque le décor devient sujet et le sujet décor. Lorsque l'érotisme et la sensualité s'entichent du vernis de la traîtrise.
Le ton est léger, presque trop, comme un été qui s'achève, avec ses déceptions, ses rancunes et ses vaines promesses. Vient alors un sourire. Vite réprimé car inopportun au possible. Pourtant inévitable et si peu à propos.
Le placement est osé, libre mais parfois balourd, beau mais un brin prétentieux. Victime d'un entourage clinquant et mystérieux, Drowning By Numbers pâtit de son ingénuité.