avril 2010:
Un peu navré de découvrir que le dvd Studio Canal n'a qu'une piste audio française à offrir, on se lance tout de même dans le bain tolédan.
Et de rencontrer un personnages des plus abjects et hypocrites que j'ai jamais vus. Fernando Rey incarne un aristocrate en pleine déchéance, égocentrique et amoureux de l'image révolutionnaire et chevaleresque qu'il se donne malgré la réalité totalement réactionnaire au contraire qui fait du quotidien de Tristana un enfer. L'incapacité du bonhomme à ne serait-ce qu'entrevoir toutes les contradictions entre ses discours et ses actes est presque d'un comique tragique, morbide, celui qui se développe à partir des caractères les plus pathétiques, lâches, engoncés dans leur suffisance et finalement fossoyeurs de leur propre bonheur.
Le pire est que la victime finit par se laisser charmer par ce qu'elle croit être de l'amour. Naît de leur relation sado-masochiste -une récurrence lorsqu'il s'agit de Deneuve chez Bunuel- une histoire triste dans laquelle le bourreau prend la place de la victime et vice-versa. Don Lope (Rey) s'humanise un tant soit peu, reçoit des curés qu'il a abhorré toute sa vie, au fur et à mesure que Tristana s'assèche, perd de son éclat, se ratatine sur ses béquilles, se fane, devient l'ombre d'elle même, une femme acariâtre et qui tient Don Lope dans ses mains. La cage a changé d'oiseau. Comme toujours chez Bunuel, l'image se confond avec le symbole à de nombreuses reprises. On s'amusera à noter quelques plans évocateurs.
Un film plaisant, intelligent, d'une profonde noirceur et d'une triste misanthropie.