La prémisse du film est de depeindre crûment sociopathes, psychopathes et narcistes vils et graveleux du "milieu" au travers moult scenes-choc de violence, de dépravation et de decadence. Tentant? Oh que oui. Mais...
Malheureusement ce film, ou plutot cet erzat de film, est ce qu'on appelle "une première couche": quand un réalisateur apporte un projet à un producteur sous forme d'un traitement écrit en une semaine avec l'accord d'un acteur célebre de jouer le role principal. Commence alors un long travail de réécriture. Dans cet état, le script n'est catégoriquement pas présentable. Quand au produit fini, on pourra prendre un certain plaisir a l'interprétation bien amusante de Philipe Caubert (il surjoue tellement fort qu'il devient l'attraction la plus distrayante du film), mais a part ca, ce navet est tellement prétentieux qu'on ne peut meme pas l'apprecier comme "so bad its good".
Le scenario, est un pot-pourri de toutes sortes de scenes de divers films de gangsters (!), et parvient en 100 minutes a empiler la totalité des clichés les plus naifs du genre. Il est évident que ces auteurs ne conaissent du milieu que ce qu'ils ont vu a la television, donc ne cherchez aucune vraissemblance dans cette bouillie d'ignorance.
Le processus narratif en soi, d'un amateurisme tout aussi navrant, n'entretient pas de tension; l'intrigue, au lieu de prendre en intensité, se dégonfle au fur et à mesure de son déroulement (!!). Quand au detail des scenes, tout est maladroitement construit, et les pivots ne sont jamais amenés intelligemment. Les deux seules scenes fortes du film se déroulent toutes deux au premier acte (!!!) et sont de toutes facons problematiques: une scène de torture soudainement "gore" style film d'horreur qui ne sert ni n'aboutit à rien en termes de story-telling, et fait bien idiote dans un film qui ensuite oublie ce parti-pris completement. Elle est stupidement accolée a l'autre moment-clef du film, une fusillade classique sur un parking, que le réalisateur a par ailleurs réussi a completement rater! C'est le niveau "fac de cinéma glandouille" sur toute la ligne. Imaginez leur scéance d'ecriture:
"Et si on prenait la scene de torture de "Casino"?"
- heu gneugen ahah ouaiis trop bien! Il lui fait gicler un oeil! nous on lui arrache les deux yeux alors ahaha hinhin gnonghon huhu
"ouais trop fort! et hey! la fusillade de "Heat" ca c'est bon aussi!"
- rrononn gnegneu ah ouais!! et on filme ca sur le parking du Lidl! ca ressemble un peu!
"ouaiih! genial gneugneu hihi et faut qu'on prenne Pacino dans scarface aussi!"
- tiens, bien vu! notre public est hetero (pas comme nous), au moins on est sur de faire viril avec ca!
Ils n'ont quand meme pas osé, que je vous entend vous exlamer. Et bien rappelez-vous que "les cons ca ose tout, c'est meme a ca qu'on les reconnait" (pour reprendre une réplique d'un vrai bon film de gangsters auquel ces insipides auteurs du nouveau cinema Francais n'ont heureusement pas touché).
Une autre gaffe impressionnante de ces apprentis cinéastes de génie: ils envoient le personage de Phillipe Caubert aux oubliettes A LA MOITIE DU FILM, sans se rendre compte qu'il s'agissait du seul personage qu'ils avaient doté de motivation (et donc qui avait pris par defaut la place de protagoniste principal)! Que font-ils donc? Ils prennent le personage de Magimel comme nouveau "lead" en essayant de lui trouver a partir de la un "MacGuffin" boiteux!
Il y a la un monumental defaut de QI d'ecriture. Comment des gens si ineptes arrivent-ils a faire des films? En tout cas, sans Caubert, vous spectateur allez desormais séverement vous ennuyer pour le reste du film.
Coté casting secondaire, Benoit Magimel est un acteur apprecié du public, mais en tueur à gages, il est complètement improbable. Réfléchissez enfin ! un tueur à gage, pas un jeune premier qui sort avec de jolis mannequins!
Olivier Marchal (un rélisateur de films du genre) est tout aussi "miscast", le personage qu'il a a jouer est une ébauche sans arc dramatique et ne sert que de faire-valoir (pensait-on en faisant appel a lui mitiger l'imposture de cette entreprise grace a un "name-dropping" approximatif?).
Tomer Sisley (ce nom sonne Juif israélien) joue un Arabe. Il est nul. Au secours. Son compatriote aussi d'ailleurs ne fait pas arabe du tout. Béatrice Dalle en femme de gangster en fin de course (un rôle qui aurait dû lui aller) a du mal à servir les dialogues ridicules qui ont été écrits pour elle.
Coté realisation, il s'agit de ces realisateurs nouveaux qui filment des gros budget avec une camera portée (saccageant le travail honnête du directeur de la photographie qui, lui, connait son métier). Attendez-vous a des scenes de "shaky cam" d'une betise monumentale ou vous vous demanderez ce que vous etes en train de regarder: ah, des mains.. oh un pied... heu.. a.. rien. Juste rien. Pretentieux et inepte que tout cela. Mais il y a bien pire ailleurs, pour dire vrai.
Pour conclure, le produit fini est un film de diletante (d'idiots en fait) de 60 minutes qui a été étiré pour en faire 100. La prémisse de départ est pourtant celle d'un film bien plus ambitieux (et qu'on aurait aimé voir), mais il aurait fallu pour la delivrer retravailler tout le script. Il aurait aussi fallu un dialoguiste competant (les interactions decrites sont souvent gênantes de naïveté pour un film de gangsters "réaliste"). Il aurait aussi fallu remplacer ce réalisateur étriqué et inepte (mais au point ou on en est, disons le, c'est le dernier soucis).
Reste un Philippe Caubert hautement divertissant (quoiqu'il se régale plus que nous), et une tentative de depeindre le milieu sous son jour le plus viscieux, chose assez rare pour quand même le signaler aux fans du genre qui, certes perdrons ennormément de QI durant le visionage, mais en tireront (peut-etre) un "guilty pleasure" delassant.
NOTE ADDITIONELLE FASCINANTE: Jetant un regard rapide sur la filmographie de ce "réalisateur", j'apprend qu'il est un de ces "fils a papa" pour qui les portes sont déjà ouvertes, et qu'il ne fait que des navets. Mais, je découvre aussi... sa tête, qui, phénomene tout a fait frappant, est une synthese claironnante dont chaque trait ne manque d'évoquer ce fameux crucifère rempli d'eau et pauvre en tout le reste devenu symbole ironique des moments les plus médiocres de la créativité humaine: https://media.senscritique.com/media/000006713430/150x201/frederic_schoendoerffer.png