Appartenant au genre dit "rose" au Japon, le film dont le titre veut dire si je ne me trompe 'C'est tout ce que j'ai' réussit ce que nul film occidental (à ma connaissance) du genre dit érotique n'est jamais parvenu à faire. C'est à dire qu'il réussit non seulement à échapper au film de genre mais aussi à nous faire entrevoir une sorte d'idéal de l'érotisme au cinéma qui ne serait pas glouton envers les autres sentiments ou affects en les réduisant à néant mais au contraire complètement intégré aux tensions, contradictions, conflits et élans des personnages et du récit.
Tsumugi - qui est l'autre titre du film et le nom de la jeune fille - est certes hors normes et délurée mais ses questions philosophiques sont encore plus délurées que son comportement et les précédent pour ainsi dire sans vouloir parler d'essence et d'existence.
Tsumugi réussit même le tour de force de nous émouvoir sur la fin et à très souvent par ses personnages. Sans doute parce que la force érotique n'a pas effacé les autres sentiments, loin de là. Apparaît même au coin d'une expression et d'une réplique une certaine densité métaphysique et ne serait-ce que pour cela, ce film est remarquable. On pourrait évoquer également ce ton impertinent et de fausset, particulier à d'autres films japonais, que l'actrice arrive à tenir sans problème et qui donne une couleur peut-être rose mais alors d'un rose bien étrange.
Bien que de loin postérieur au film d'Oshima, on comprend mieux pourquoi seul ou presque un japonais était arrivé à filmer sans complaisance ni forfanterie l'empire des Sens.