By the rivers of Babylon...
Dans la steppe kazakhe, quand une fille vous repousse parce que vous avez les oreilles décollées, en plus de coller la dose standard de haine propre à tout rejet, vous pouvez aussi dire adieu à toute chance de fonder une famille, d'obtenir un troupeau et de devenir indépendant ; parce que dans la steppe kazakhe, des filles, ça ne prend pas de s.
Ma grande connaissance du cinéma d'Asie Centrale pourrait m'être utile pour analyser le film, mais j'ai peur de vous perdre avec des films qui, bon, forcément, n'ont peut-être pas rencontré un immense succès public ailleurs qu'au Tadjikistan.
Sachez juste que Tulpan est le premier film de Sergei Dvortesvoy, ancien documentariste, qui va adopter pour sa fiction une méthode et un style hérités de ses premières amours ; s'attachant à montrer les conditions de vie, les enjeux, les comportements de ses personnages sans didactisme mais avec un soin du détail minutieux, le cinéaste kazakh donne une œuvre dépaysante au possible, affranchie des standards du cinéma civilis... occidental, pardon, qui est un bel hommage à ces oubliés de la planète, à cette micro-société qui semble vivre avec deux ou trois siècles de retard sur le reste du monde, et qui ne s'en accommode pas si mal.
Proposant des scènes dures -l'accouchement de la brebis-, une magnifique lumière qui inonde le néant des paysages et même une belle émotion sur ses derniers plans, Dvorstevoy a sans doute bien fait de quitter le monde ingrat du documentaire pour rejoindre le monde ingrat de la fiction du Tiers-Monde qui passe en deuxième partie de soirée sur Arte.