Tout roublard et volubile qu'il est, Verhoeven est avant tout un sacré hédoniste. Une recherche du plaisir charnelle pour lui mais également une envie de la faire partager à son spectateur. L'expérience est assez osée mais incroyablement efficace et universelle. "Turkish", c'est un peu la recette d'un grand chef aidé d'un second et d'un saucier. Un plat revisité et parfois (trop) épicé mélangeant le salé et le sucré et révélant en fin de compte un secret inavoué : Une amertume malvenue mais qui marque les (pa)pupilles.


La métaphore culinaire peu paraître lourde mais les corps de Hauer et Van de Ven sans cesse palper de haut en bas dévoilent la phase première de l'amour: Le sexe. Qui mieux que Verhoeven dans ce film sait faire parler la peau, les poils frémissants et les yeux ? Des jeux qui impriment chaque photogramme. La passion dans ce qu'elle a de plus dévorante et de plus destructrice.


L'arme de séduction massive sera donc un ange blond et masculin arborant régulièrement des t-shirts de couleur. Un artiste vivant dans un atelier transformé pour l'occasion en loft. "Eric"est un doigt d'honneur à la high class sur laquelle il vomit littéralement dessus. Celle qu'il aime est une déesse qu'il dessine et pétrit. Ce gâteau de chair qu'il extirpe des griffes de sa famille c'est Olga, belle et incandescente mineure dont il va demander la main. Mais Verhoeven, lucide qu'un tel feu d'artifesse ne peut se terminer par un baiser en gros plan, va céder au chaos et à la tristesse la plus significative.


Film emblématique de la carrière du hollandais violent, "Turkish fruit" et sa toile de fond post woodstock est un hymne à la liberté sexuelle. Une époque de plaids à carreaux dégueulasses, de pattes d'eph' et de cônes épais comme le pouce. Une envie de dévorer la vie à pleine dents en buvant un Bordeaux sous une pluie battante. Eric est le double du cinéaste. Les cheveux longs et en bataille, Verhoeven se voit en libertin, le sexe au vent draguant les demoiselles aux abords des cabines téléphoniques. A chaque plaisir, son revers funeste. La lucidité de l'artiste de voir l'Amour lui échapper au profit de la grande faucheuse en dit long sur l'auteur de Basic Instinct. Car s'il est permis d'imaginer qu'une partie de sa vie s'est jouée entre les seins de Monique Van de Ven, il est autorisé de penser que l'entrejambe de Catherine Trammel est son sanctuaire.

Star-Lord09
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le 15 juin 2015

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