Ayant rencontré sur les conseils insistants de ses parents Sandra (Vinessa Shaw), la fille du futur propriétaire de l’entreprise où il travaille, Leonard Kraditor (Joaquin Phoenix) entame une relation un peu forcée avec cette dernière. Mais la rencontre de sa belle voisine (Gwyneth Paltrow) va radicalement changer les choses pour Leonard. Seulement, celle-ci a déjà un amant (Elias Koteas), un homme marié, mais elle-même hésite sur le caractère durable de cette relation.
On ne finira jamais de chanter à chaque fois davantage les louanges de James Gray, un des rares réalisateurs actuels qui pourrait sans ridicule se proclamer de la race des Lubitsch, Wilder et autres Capra. Peintre incroyable de l’âme humaine, qu’il a explorée sous plusieurs facettes dans ses précédents films, Gray quitte le milieu des gangsters pour nous offrir ici un mélodrame romantique, librement inspiré d’une nouvelle de Dostoïevski. Et ici, la délicatesse infinie de Gray et son sens de la mesure lui permettent d’éviter presque tous les écueils du genre.
Ainsi, Two lovers ne sombre jamais dans le pathos, impressionnant par la justesse de ses sentiments et la finesse de son écriture, qui ne le cède que rarement à la facilité. Joaquin Phoenix livre ici ce qui est peut-être sa meilleure prestation chez Gray, incarnant à merveille cet homme fragile, tiraillé entre un amour raisonnable et un amour romantique, et est épaulé par deux sublimes actrices, Gwyneth Paltrow et Vinessa Shaw. Le tableau n’est pas dénué de fautes, à l’image de cette scène où la mère (lumineuse Isabella Rossellini) voit son fils partir, plaquant tout – y compris sa fiancée – pour s’échapper avec son amante, et ne trouve qu’à lui dire que tout ce qui compte, c’est qu’il soit heureux. Mais lesdites fautes s’avèrent minimes puisque, finalement, la morale et la raison sortiront triomphantes du récit. Et si
le revirement final de Leonard
ne semble avoir lieu que par la force des choses, il permet de montrer que l’amour sincère ne se trouve pas toujours là où on veut le voir, et qu’il nécessite de savoir sacrifier ses rêves illusoires, pour pouvoir trouver le bonheur là où il se trouve réellement : à portée de main.
*G.K. Chesterton