Le tiraillement d'un homme
Voilà, j’ai enfin vu le dernier Gray qu’il me restait à voir. J’avais eu énormément de mal avec Little Odessa, son premier film. Mais force est de constater que ses deux films suivants, The Yards ainsi que We Own the Night, m’avaient clairement tapé dans l’œil. Pour moi les deux se valent, les deux se ressemblent beaucoup aussi. La famille et la mafia étaient les deux lignes directrices des films de Gray avant ce fabuleux Two Lovers.
Enfin, que je ne dise pas de bêtise. La famille est un thème qui est cher à Gray et à nouveau dans celui-ci, elle y est. Mais là ou Gray surprend, c’est lorsqu’il en vient à traiter le thème de l’amour, chose qu’il n’avait jamais ou alors très partiellement évoquée dans ces précédents films. Pour ceux qui doutaient donc de la capacité de Gray à se renouveler, ça doit leur en boucher un coin. Ce film est bouleversant et très intelligent.
Tous les recoins de l’amour ne sont pas exploités mais l’histoire à laquelle on a droit est magnifiquement écrite. Le mec désespéré qui n’a jamais eu de chance en amour, qui lorsqu’il tombe amoureux d’une femme complètement aveuglée par sa propre histoire, ne le regarde à peine. Et cette autre fille qui intervient grâce aux parents qui par l’intermédiaire d’une fusion de business, y voit aussi un intérêt familial et conjugal, à l’ancienne. L’homme est complètement perdu et vacille, se sentant trompé par l’une, obligé par l’autre, puis change d’avis, pour finalement revenir à sa décision initiale, ou pas. Jusqu’à la fin le sort de Leonard, interprété par un grand Joaquin Phoenix (oui, encore une fois), n’est pas sûr et instable, à l’image de son propre personnage.
Depuis Shame de Steve McQueen (II) et Blue Valentine de Derek Cianfrance, je n’avais pas vu un film sur l’amour aussi fort et poignant que celui-ci. J’aime aussi beaucoup les filtres utilisés par Gray, qui donnent à la photographie un sombre teint : le ciel n’est jamais bleu, on a toujours l’impression d’être perdu quelque part en hiver, et que l’on vit un mauvais jour. Et même lorsqu’il y a une éclaircie, cela ne dure pas très longtemps et on redescend sur Terre, avec tous nos problèmes. Très beau film, vraiment.
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