Nous voilà dans le milieu des critiques de cinéma !
Monde qui parle à tous les cinéphiles qui fréquentent ce site.
Un homme de Lettres cherche désespérément un emploi dans son domaine de compétence qu'est l'étude du français médiéval. Certes brillant, ses qualités ne lui offrent malheureusement que peu de débouchés dans le monde de l'emploi tel qu'il est de nos jours.
Sa maîtrise de la grammaire et du langage lui permettent de se faire embaucher dans le journal du coin pour lequel il doit rédiger des chroniques cinéma entre autres attributions.
Pris au jeu, il se met à reprendre les idées d'une grande revue spécialisée. Là, on retrouve notre François, dans la peau d'un George Duroy de notre époque. Un ambitieux prétentieux.
Filmé en noir et blanc comme un hommage à la nouvelle vague française, ce film a la saveur du cinéma audacieux qui sait réfléchir sur lui même et son milieu.
La double vie, l'imposture, sont au centre de cette tranche de vie. Une étude également sur les mécanismes du désir et de la sexualité dans cette spirale qu'est la volonté de se faire une place dans un monde de paillettes et d'illusion. La sexualité comme symbole de pouvoir sur l'autre est personnifiée par la collègue de François qui d'opportuniste va devenir soumis au bon vouloir de son initiatrice.
Les corps sont filmés au plus près et la fluidité de la narration font ressortir la mécanique du désir qu prend peu à peu le pas sur le thème de l'escroquerie de personne. Il ne faut pas croire que Lionel Baiër fait dans l'austérité ! Certes c'est un film d'auteur dans ce que l'acception a de meilleur mais c'est aussi humain et drôle. Drôle dans les dialogues comme dans les situations et le sujet est assez rarement traité au cinéma pour qu'il suscite l'intérêt de cinéphiles assumés. La scène de l'interview de Bulle Augier et à ce titre fabuleuse, clin d'oeil à la Salamandre d'Alain Tanner
Je me souviens d’avoir vu «La Sirène du Mississipi» de Truffaut un soir de l’été 88. J’avais 12 ans. Et ce soir-là, le vieux téléviseur Philips de mes parents s’accordait véritablement à mes désirs: double vie, imposture, énigme, voiture, neige, violence et surtout les corps de Catherine Deneuve et Jean-Paul Belmondo. Un homme à la virilité nerveuse filmé comme une collé- gienne et une femme tout en verticalité. Ce fut, pour moi, une réponse à un désir naissant. Et c’est ce désir qui m’a conduit à diriger Robin Harsch et Natacha Koutchoumov dans «Un autre homme». La neige, la voiture, l’imposture, la double vie, le sexe et la violence ont suivi. La consigne implicite passée à toute ma petite équipe a été de mépriser mon scénario et de jouer le tout pour le tout à chaque instant. Et puisque nous n’avions pas d’argent, c’est notre désir et notre énergie que nous avons misés. J’ai essayé ainsi de faire vivre à l’image ce trouble ressenti à 12 ans qui me fit quitter définitivement l’enfance.
Lionel Baier