Cat Ballou, Mort ou vif et cette fois Un colt pour 3 salopards.
Contrairement à ceux cités plus hauts, Un colt pour 3 salopard, bien qu'étant un western anglophone, a plus l'allure d'un western spaguetti avec beaucoup de gros plans, ralentis ainsi que la violence propre à tout western spaguetti ou western tout court.
Avant toute chose, ce film prouve que le western n'est pas un genre destiné uniquement au public masculin.
Raquel Welch le prouve bel et bien en interprétant Hannie Caulder (titre original du film en VO donnant son nom au personnage éponyme), une femme qui a vu son ranch être détruit, son mari assassiné et, pire que tout, a été violée collectivement par trois frères bandits.
A partir de cet instant-là, Hannie ne sera plus obsédée que par la vengeance en étant entraînée pour tirer au colt par le chasseur de primes Thomas Luther Price (Robert Culp).
Et qu'est-ce que ça vaut tout ça?
Et bien, c'est assez divertissant: Hannie est une héroïne humaine avec des faiblesses tout en ayant une force de caractère et une détermination acharnée pour atteindre son but.
Thomas, lui, est convaincant et émouvant dans son rôle de mentor d'abord réticent, brutal et sévère puis plus ouvert, plus sympathique et plus affectueux par la suite.
Il y a de fortes chances que sa mort vous fasse verser une petite larme.
On peut toutefois déplorer le fait que les autres personnages (Bailey [Christopher Lee], les enfants avec qui Hannie sympatise...) soient mis en retrait et effacés se contentant d'être des figures de soutien sans profondeur peu présentes dans l'histoire.
Maintenant que nous avons parlé des gentils, parlons des méchants.
Les trois violeurs sont, évidemment, des personnages immondes qu'on rêve de voir crever. Etrangement, Un colt pour 3 salopards est parvenu à en faire une version horrifique des Dalton mêlant le comique et le menaçant; en effet, Ernest Borgnine interprète un Dark Averell réduisant toujours à néant les plans de ses frères (interprétés par Jack Elam et Strother Martin) ayant sans arrêt envie de le frapper à chaque échec qu'il cause. Mais malgré cet aspect comique, ce trio de "salopards" demeure menaçant et terrifiant: porcs sadiques, bon tireurs et lanceurs de couteaux...
...qui parviendront à tuer le mentor de l'héroïne...
...bref, en plus d'être terrifiants, ils sont dangereux.
En parlant de terrifiant, la première scène du film exige que vous ayez le coeur bien accroché. En effet, le fait que la scène de viol ne soit pas gore de manière gratuite mais à peine montrée et majoritairement suggérée par les cris de détresse d'Hannie que nous entendons hors-champ rend la scène authentique de manière morbide au point nous aimerions entrer dans l'écran pour venir en aide à la pauvre Hannie incapable de se défendre dans cette situation désespérée.
Malheureusement, si ces bons aspects du film permettent de passer un bon moment, on ne peut pas ignorer ses défauts.
Pour commencer, dans la première scène du film, le sang manque de réalisme étant d'un rouge trop clair pour être crédible. Heureusement, cela ne se reproduit pas par la suite.
Ensuite, le principal problème du film est que, pendant la première moitié de l'histoire, Hannie est bien trop en retrait par rapport à certaines péripéties ne prenant de véritables initiatives que dans la deuxième moitié du film.
Certes, l'aspect est voulu pour montrer une évolution de personnage où l'on passe d'une femme incertaine et apeurée dans un monde de brutes à une femme mature et bien plus sûre d'elle.
Seulement, la trop courte durée du film ne permets pas réellement de profiter de cette évolution-là.
Toutefois, le fait qu'Hannie se venge de manière jouissive; y compris dans le climax qui, même s'il est trop bref, montre, de manière convaincante, l'évolution d'Hannie ayant retenu tout ce que Thomas lui a enseigné pour être une véritable badass.
Et ce n'est pas tout: en dehors d'Hannie et son background, les autres personnages ne sont pas très approfondis. Pourquoi Thomas est chasseur de primes? On sait pas. Pourquoi est-il ami avec Bailey? On sait pas.
Quant au reste des personnages, ce sont juste des méchants très méchants (toutefois parfaits dans cette fonction-là) ou des personnages-fonctions comme le shérif; et, malheureusement, des prostituées avec à peine deux lignes de dialogues. Aspect exaspérant et insultant semblant indispensable aux yeux des créateurs de westerns même ceux qui acceptent de mettre des héroïnes en avant.
Chose bien mise en évidence quand une maquerelle en "robe très courte" dit à Hannie habillée en cow-girl "[Qu'elle] ne l'a pas engagé" de manière méprisante lorsque l'héroïne monte dans un couloir de chambres d'un saloon.
Sans compter le fait qu'Hannie elle-même se montre odieuse avec les prostituées en question en les snobant/effrayant tel un héros-goujat de westerns sous-entendant/disant "man-talk" lors d'une confrontation entre un cow-boy héros (alors qu'Hannie est une cow-girl héroïne) et un cow-boy méchant comme on en a beaucoup trop vu dans de nombreux films consacrés au Far-West.
Pire, le fait que les personnages bienveillants et mentor poussant Hannie à se dépasser soient tous des hommes semble sous-entendre que l'ascension des femmes ne peut passer que par eux.
Ainsi, Un colt pour 3 salopards transmets l'idée erronée et nauséabonde que quand une femme est indépendante, elle est forcément une exception à la règle "naturelle" que toutes les femmes sont censées être des objets de désir pour les hommes.
Paradoxal pour un film parlant d'une femme ayant été réduite au statut de femme-objet de manière ignoble par des violeurs (représentant la masculinité toxique) cherchant à se venger d'eux prouvant ainsi qu'elle n'est pas une poupée soumise qu'on peut maltraiter à sa guise en faisant payer à ceux qui l'ont maltraitée.
De plus, le prétexte "C'est un western donc c'est normal que ce soit sexiste" n'est pas valable vu que dans Cat Ballou, Cat ne crache pas à la gueule des prostituées parce qu'elle a autre chose à faire; tout comme Ellen dans Mort ou vif pour la simple et bonne raison qu'il n'y a pas de prostituées.
Cependant, malgré ces défauts, le film reste très divertissant faisant passer un moment agréable grâce à une mise en scène bien pensée et soignée.