Ce film aux limites du contemplatif actif est construit de tableaux vivants, de sculptures naturelles improbables, de formes indistinctes, d'images d'archive, dont un film franquiste, qui se succèdent les unes aux autres. Les artistes se servent goulûment des paysages. de tableaux mystérieux, un véritable délice visuel et voyage dans les arts.
Nous suivons ainsi l'avancée d'hommes et de femmes à travers une nature hostile formant un tout énigmatique ,voire inquiétant. Les images, les actions se déroulent sur un rythme étouffant dans les rocailles et les parties boisées de l'île où ont débarqué à la nage les trois fugitifs. Ils ont sauté d'une Caravelle de la flotte de Christophe Colomb voguant vers les Indes, nous sommes en 1492, sur laquelle ils avaient embarqué pour échapper à la prison. Ils emportent avec eux quelques maigres provisions et une voile du navire censée les protéger.
En parallèle deux sœurs cheminent entre broussailles, ronces et pierres, la plus jeune, malade, couchée et attachée sur un âne et la plus âgée qui tient la corde de l'animal.
Peu de dialogues, tout est suggéré, dit avec les seuls regards et gestes, Un corps sous la lave est tout en sensations et émotions, avec comme fil conducteur cette menace diffuse, permanente, du danger et de la mort qui plane portée par une musique sombre et lancinante. C'est empli d'une poésie brutale qui vous arrache à votre confort habituel.
Je n'ai pas été surpris d'apprendre que Helena Giron et Samuel M. Delgado, les deux réalisateurs, viennent des arts plastiques. Ils réalisent ici un grand film, original et atypique. Une expérience à ne pas louper.
Il faut savoir que c'est un film aux budgets et moyens très limités, ici il a été très peu projeté. C'est dommage cette production faiblarde, c'est pourtant un beau film, un autre regard sur la cinéma.
L'action se déroule aux îles Canaries. Le tournage principal a duré quatre semaines, deux en Galice et deux aux Canaries.