L'air de ne pas y toucher
Dans le genre titre accrocheur, on a déjà fait mieux. Mais cette volonté assumée est sans doute la clé du film. Comment un réalisateur peut-il évoquer le sujet qui lui tient le plus à cœur sans tomber dans le pathos ? Pour éviter ce piège, l'enquête sur le père disparu est menée de façon très sage et méthodique. Ce sont les personnes interrogées qui se chargeront du reste, avec leurs non-dits, leurs interrogations, leurs larmes. Au fil des témoignages apparaissent une autre mort jusqu'alors cachée, des conflits, des jalousies, des rancunes, comme il y en a dans toutes les familles. Loin de se sentir le voyeur des vicissitudes de la vie des autres, le spectateur entend en lui l'écho des aléas et des tragédies de sa propre famille, des souvenirs enfouis, des haines et des malentendus dont il a depuis son enfance été le témoin. Grâce à cet effet, Un documentaire sur mon père sort du strict cadre informatif et amène le public à s'interroger sur l'étrangeté des liens qui unissent les membres d'une famille, sur la recherche de l'amour sans cesse contrariée, sur les errements dans la quête de la vérité. Vers la fin, la catharsis est subtilement évoquée par le Clair de Lune de Debussy joué enfin juste, sans les tâtonnements de la première scène. Le réalisateur peut désormais pardonner, se mettre en paix avec lui-même et avec les autres, passer à autre chose. Pauvre au début, il repart riche. Généreux, il partage cette richesse.
Un documentaire sur mon père est un film de fin d'études. Il sort très nettement du lot.