Bon, c’est vrai. L’histoire est nulle. Bon. Il est vrai que la mise en scène est inégale. Bon, le film a vieillit dans tous les sens du terme. Mais c’est vrai aussi que c’est une parodie. Et comme dans toute bonne parodie, les défauts peuvent vite se transformer en qualités de fabrication. Le trio : Hill/Charlebois/Miou-Miou. Ce casting, c’est déjà une blague à la base car il fait tout de suite rire. Se moquer du western spaghetti, qui lui-même détournait les codes du western traditionnel. C’est décalé tout comme il faut. Un western-bouffe, qui ne ressemble à rien de connu, et qui porte la patte très originale de Damiano Damiani. Même le nom du réalisateur est drôle. Damiano a décidé de se lâcher. Gag à la Lucky Luke, voleurs, cow-boys ou indiens traités comme tels, des voleurs-blagueurs. Pas de bons, ou de méchants, tous des idiots. Damiani n’est pas italien pour rien, tous plus ou moins roublards ces personnages. L’ouest sauvage transformé en désert poussiéreux. Le duel final, qui se déroule… au début du film. Le monde de l’ouest à l’envers. La ville poussiéreuse et comme sortie du désert, avec un bar, des putes, des joueurs de cartes, c’est tout. On dirait Ali Baba et les quarante voleurs. Un génie, quelques coups de feu, mais très peu, et une idée fixe, entériner la fin d’un genre, le western. Le film date de 1975, il était temps de jeter quelques pelletées de terre sur le cercueil, en rigolant.
Joe Merci, (très drôle !) Terence Hill, joue au gendarme et au voleur avec Locomotive/Charlebois, pour savoir qui pourra avoir la fille, Miou-Miou, (très drôle nom de scène). Joe Merci, héros, acrobate, Arlequin aux milles visages, Lucky Luke. Locomotive, le faire-valoir bavard, est Polichinelle, et indien. Et Miou, la caution blonde, qui semble avoir la cuisse légère. Des trucages, des personnages grossiers et assumés. Tenez-vous le pour dit : ça va être burlesque à tout prix. Á ne pas prendre du tout au sérieux, c’est fait pour ça.
Sur moi, ce film a fonctionné tellement bien quand j’étais petit que je me rappelle encore des dialogues ! Á part Klaus Kinski, que j’avais complètement zappé alors qu’il apparaît, (brièvement). Le fonctionnement de la mémoire c’est quelque chose d’indéfinissable-ment compliqué à comprendre. Et le goût aussi.
Je ne sais pas pourquoi, j’ai adoré, au point de comparer au culte : « Mon Nom Est Personne », et j’ai été bien le seul. J’entendais plutôt : « Joe Merci ? C’est nul ! » Pour moi c’était génial. Un assemblage de scènes toutes plus au moins improvisées, collées au montage, sans lien apparent à part les costumes. D’autres scènes qui mettent le film en lice pour l’attribution du navet du mois, tant ces scènes sont lourdes ou bourrins. La complicité du spectateur, qui acceptera ou pas de jouer le jeu, va faire le reste, et elle est largement recommandée pour que ça marche. Mais il y a le meilleur. $£€… la musique…
La musique d’Ennio Morricone apporte un réel supplément d’âme. Bruitages originaux, mélodies légères, orchestration savante, espiègle. C’est peut-être lui le vrai génie dont on parle dans le film, non ? Sans cette musique là, sur ce montage là, on n’aurait même pas un western-spaghetti bolognaise, mais un plat de vermicelle pas cuites. Un navet potiron, légume, décalé à un point des choses que j’avais l’habitude de voir à la télé, que j’ai adoré tout de suite, et le charme fonctionne toujours. Facile, génial, paresseux les trois quart du temps, faut pas être un génie pour comprendre que c’est filmé, joué, monté second degré, sauf Ennio Morricone, le seul qui prend la chose au sérieux, d’où la musique qui nous rappelle, et pour cause l’ambiance des Sergio Leone.