Imposture, jamais ne dure
ATTENTION SPOILERS
Quand Mathieu tombe sur le manuscrit d'un mort qui a vécu de l'intérieur la guerre d'Algérie, celui-ci le fait sien et s'approprie un talent qui le dépasse en s'habillant d'un costume trop grand pour lui. Accédant à un succès usurpé et au bras de celle qu'il a aimé dès le premier regard, le prétendu écrivain a tout pour être heureux. Mais petit à petit, des nuages viennent voiler le ciel de sa vie. Oh, quelques broutilles : l'éditeur qui s'impatiente, le banquier grognon et ses ultimatums, puis la page blanche du second roman... Rien d'insurmontable, pense-t-il, avec un peu de temps pour se retourner et quelques mensonges supplémentaires.
Puis l'étau se resserre quand un maître chanteur qui semble avoir connu le véritable auteur sort de son silence pour le monnayer. Les événements échappent alors au contrôle de Mathieu et, à mesure que le film avance, on sent le héros de plus en plus petit dans le vêtement de celui qu'il prétend être, jusqu'à s'étouffer dans les replis du tissu à mesure que les accidents et les mensonges s'empilent, menant littéralement sa vie dans une impasse.
Pierre Niney fait bien sentir la pression permanente qui pèse sur les épaules du personnage : être à la hauteur du talent qui n'est pas le sien, faire bonne figure et affronter la menace constante de la révélation du secret par un témoin pressant et omniprésent. Tout cela jusqu'à la perte d'identité. Il interprète à merveille le fardeau du mensonge sans cesse renouvelé. Seuls l'expression de son sentiment amoureux et la relation qu'il entretient avec sa compagne éloignent pour un bref instant la duplicité du personnage, moments trop brefs à l'issue desquels le masque couvre à nouveau un visage d'une fragilité parfois déconcertante.
Commençant dans un soleil éclatant qui décline lentement dans son intensité jusqu'à laisser place à la nuit, le scénario et la réalisation de Yann Gozlan tiennent quant à eux brillamment le spectateur en haleine. L'intrigue ne relâche quant à elle son étreinte que dans les dernières minutes, derrière une vitrine inondée de pluie brouillant un bonheur fantasmé que l'on a juste effleuré du doigt et une vie que l'on a traversée tel un fantôme.
Quelques petites invraisemblances et une sous-intrigue à la conclusion délaissée ne viendront en aucune façon gâcher le plaisir ressenti durant la projection et faisant de cet Homme Idéal un spectacle plaisant et recommandable.