Un jour dans la vie de Billy Lynn est un film intriguant, déjà sur le papier parce qu'il est tourné en 3D et HFR, les seuls autres films sortis tournés de la sorte étant The Hobbit et que ça ne semblait pas être un blockbuster XXL qui justifierait ça par des scènes spectaculaires. Au contraire, il semblerait que le film soit plutôt intimiste.
Tant mieux, parce que là Ang Lee (que je n'aime pas spécialement) montre que justement ce genre de technologie n'est pas réservée à un certain type de film à grand spectacle et que ça peut servir à n'importe quel type de film si c'est bien utilisé. Alors ayant vu le film "normalement" je ne peux pas témoigner de son utilisation, mais vu la beauté de la mise en scène et de la photographie, je regrette de ne pas pouvoir voir la version voulue par Ang Lee.
Parce que oui, le film est visuellement sublime. Il a beau être intimiste, parler de Billy Lynn, de sa vie (ce qui est d'ailleurs le thème du film, la vie du soldat n'est pas juste une histoire, c'est sa vie) il ose allier le grandiose au terrible et à l'intime.
Ce que j'ai particulièrement aimé c'était cette manière de filmer les champs contrechamps vraiment à hauteur d'homme, de leur donner toutes les lettres de noblesses nécessaires pour les rendre non pas mous, ou des passages obligés, mais comme faisant partie intégrande de la vie des gens, regarder l'homme à hauteur d'homme au travers du regard d'un homme.
Surtout que ce qui est dit dans ces scènes n'a pas une fonction purement narrative, c'est là pour développer les personnages, pour faire comprendre comment ils sont, qui ils sont, ce qu'ils voient, comment ils le perçoivent.
Le film est d'ailleurs, malgré une approche assez premier degré et belle du personnage de Billy Lynn, extrêmement cynique et désabusé. On voit ces soldats qui rentrent en Amérique après une mission difficile qui a vu la mort d'un des leur (Vin Diesel, dans l'un de ses meilleurs rôles) se faire déposséder de leur histoire, se faire marcher dessus par ceux qui sont contre la guerre, se faire instrumentaliser pour faire la promotion de cette guerre auprès du grand public, mais surtout ils voient ce pour quoi ils se battent. Ils se battent pour que les gros porcs puissent continuer à bouffer leur frites et boire leurs sodas... Ils se battent pour que la démesure ricaine puisse continuer.
Le film arrive magnifiquement à rendre cette démesure outrageante. Avant la fin il n'y a presque pas (ou alors très bas) de musique extradiégétique, les personnages sont seuls, sans musique pour les accompagner dans leurs longs échanges, on voit ce que Billy Lynn a vécu, le pauvre type qu'il est, qui n'a pas sa place dans ce monde, où la seule personne qui semble réellement tenir à lui c'est sa sœur (Stewart dans son meilleur rôle) et tout à coup : l'abondance. La nourriture, les cris, les effets spéciaux, le surplus ridicule pour accueillir des icônes de la musique.
Même ce qui pourrait sembler doux (hors la relation avec sa sœur) sont en réalité extrêmement cyniques, je pense à toute la relation avec la pompom girl qui semble pure et naïve (voire même trop) et qui se révèle finalement n'être (et tout en subtilité) qu'un cynisme supplémentaire de la part du film.
Billy Lynn offre un reflet extrêmement vrai et touchant de l'Amérique vue par ses propres soldats, sans pour autant jamais faire l'apologie de la guerre en Irak, mais révèle malgré tout un problème majeur, si les forces vives de la nation ne trouvent pas de place chez et la trouve uniquement à aller tuer et se faire tuer à l'étranger, c'est que cette nation fait quelque chose de mal.
Bref, c'est un film sur tous les égoïstes d'Amérique qui se servent de la vie des gens pour leurs intérêts, qui se servent de la douleur, qui se servent du statut de ces soldats pour assouvir leurs propres projets.