Au cinéma, parler de l'enfance n'est jamais simple et souvent artificiel. Dans son premier long-métrage, la cinéaste belge Laura Wandel nous convie à une véritable immersion, d'un réalisme saisissant, dans le petit monde de l'école, principalement dans la cour de récréation, où les enjeux sont autrement plus cruciaux qu'il n'y parait, aux yeux d'adultes qui ont oublié leur propre expérience. Nora est la figure centrale de Un monde, témoin et actrice, et c'est à travers ses yeux et à sa (petite) hauteur que sont vus les jeux et drames d'un microcosme dans lequel elle doit trouver sa place, remettant en question sa relation avec son frère aîné, victime de harcèlement. Toute la violence de la société est déjà là, avec ses codes, sa hiérarchie et ses rapports de domination. Le corps enseignant, l'administration scolaire et les parents sont présents, en périphérie, mais ce ne sont pas eux qui expérimentent et ressentent la dureté de ce "vivre ensemble" qui passe parfois par la peur ou l'humiliation. Il y a des moments bouleversants dans Un monde, qu'ils soient de solitude, de rébellion ou d'abattement, au milieu d'un environnement saturé par le bruit de fond permanent de la cour de recréation (un travail admirable de l'équipe chargé du son). Le film ne dure que 73 minutes et laisse un peu frustré, tellement, malgré sa souffrance, on aimerait accompagner plus avant la petite Nora dans son apprentissage de la vie et, si possible, la voir enfin sourire. Maya Vanderbeque, 9 ans au moment du tournage, est d'une justesse incroyable dans un rôle pour le moins complexe et exigeant.