Journaliste, David Dufresne a travaillé à Libération dans la presse écrite ou encore dans la chaîne d’information en continu I-Télé. Il a collaboré avec le site internet Mediapart. Auteur de plusieurs documentaires réalisés pour la télévision, le réalisateur signe son premier documentaire sorti en salles, au cinéma : Un pays qui se tient sage. Son documentaire revient sur les conflits sociaux nés durant le mouvement des Gilets Jaunes et s’interroge en grande partie sur les violences policières constatées durant ces manifestations. Un sujet qui avait occupé le journaliste au long cours pendant le mouvement des Gilets Jaunes : depuis le 4 décembre 2018, David Dufresne avait recensé les témoignages de blessés pendant les manifestations. Sur Twitter, il avait pris l’habitude d’interpeller le ministère de l’Intérieur sur ce sujet, avec le hashtag #AlloPlaceBeauvau.
Disons le d’emblée : bien que tout public, le film de David Dufresne n’est pas à montrer à tous. Un pays qui se tient sage est un film sur la violence, et qui la montre donc, frontalement. Il y est question tant de la violence physique de ces affrontements entre manifestants révoltés et policiers répressifs, que de leur violence psychologique, symbolique, comme lors de cette interpellation de lycéens à Mantes-la-Jolie, en décembre 2018, où les policiers avaient alignés les jeunes, genoux à terre et mains sur la tête. “Voilà une classe qui se tient sage”, entendait-on dire l’un des policiers, que l’on devine sarcastique derrière sa caméra.
D’emblée, Un pays qui se tient sage montre son questionnement au spectateur. Dès les premières minutes, le sociologue Max Weber et sa théorie de la détention du monopole de la violence par l’Etat, est cité. Les points de vue s’enchaînent, les intervenants aussi. Certains étaient des manifestations de Gilets Jaunes, d’autres sont des spécialistes divers, des policiers… Mais ça, vous ne pourrez que le deviner. Leur nom n’apparaît jamais. L’image de David Dufresne n’est alimentée d’aucun insert, aucun son autre que les propos des intervenants et le tumulte des manifestations. La volonté du réalisateur ? Gommer le statut des protagonistes pour mieux s’attacher à leurs propos. C’est réussi. Au choc des images, David Dufresne donne de la hauteur avec les mots, invitent les différentes parties au débat et à la réflexion.
Il montre aussi qu’engagé ne veut pas dire orienté. Le point de vue du cinéaste est plutôt évident mais ne voyez pas dans Un pays qui se tient sage un pamphlet au discours unique. Avec ses nombreux intervenants, le film invite surtout le spectateur au questionnement et à la remise en cause. Un pays qui se tient sage donne une certaine image de la société française contemporaine. Et de ses maux.