Bien loin de ce qu’avait pu faire le duo Ruffin / Perret avec le documentaire J'veux du soleil (2019) ou plus récemment avec Un pays qui se tient sage (2020) de David Dufresne, cette fois-ci, on retrouve les gilets jaunes à travers une toute autre approche. Pour les besoins de son film, Emmanuel Gras s’est intéressé aux mouvements contestataires en filmant un petit groupe de manifestants. Lorsque les gilets jaunes voient le jour en octobre 2018, le phénomène prend de l’ampleur très rapidement à travers l’hexagone et se voit constituer d’une multitude de groupe dans chacune des régions de France. Le réalisateur a suivi pendant 6 mois un groupe de manifestants basé à Chartres en Eure-et-Loir, ce film est leur histoire, leur appropriation du mouvement et leur combat au fil des mois.
Un peuple (2021) nous replonge dans le marasme ambiant qui régnait en France entre fin 2018 et début 2019. Tous les samedis sont rythmés par les manifestations (et parfois le saccage) des gilets jaunes. Le réalisateur a donc suivi ces hommes et ces femmes, vivants parfois dans précarité. Facilement reconnaissable avec leurs gilets jaunes, ils investissent le rond-point de la Voie de la liberté (où se croisent les départementales D910 & D823), chaque jour, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Au fil des saisons, Emmanuel Gras a réussi à ne faire plus qu’un avec eux, les suivants aux grès des manifestations aussi bien à Chartres qu’à Paris, des réunions de groupes en passant par les conférences citoyennes, jusqu’à leurs opérations "péages gratuits". Leur mobilisation est sans faille, malgré quelques dissensions au sein du groupe.
Le réalisateur nous immisce en plein cœur des manifestations, qu’elles soient pacifiques (en province) ou violentes (notamment lors du saccage de l’Arc de Triomphe en décembre 2018). Il donne aussi la parole aux gilets jaunes, les échanges sont très intéressants et donnent parfois lieux à des confrontations où les avis divergent entre gilets jaunes et commerçants (qui ne comprennent pas à la fois la mobilisation ou/et les saccages qui peuvent survenir lors de certaines manifestations et dont les gilets jaunes ne sont pas les fautifs ou du moins, pas le groupe que suit le réalisateur).
La fatigue physique et mentale se lit sur leurs visages, certain(e)s sont au bord des larmes. Leur combat pour (notamment) imposer le RIC (Référendum d'Initiative Citoyenne) semble ne pas trouver écho auprès du gouvernement. Le dernier plan du film est ce fameux rond-point de Chartres, vidé de ses gilets jaunes, les stigmates des feux de palettes sont encore présents. Sur les images résonnent en fond sonore les revendications des manifestants, comme pour signifier que le mouvement, 3ans après avoir vu le jour, était loin d’être terminé et que le combat continue toujours.
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