Que la défaite commence
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le 27 nov. 2020
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Dans ses films tragi-comiques, Roy Andersson crée une succession de tableaux vivants mettant en scène des situations banales et absurdes de la vie quotidienne qui révèlent implicitement des problèmes sociaux et existentiels. Le sentiment d’absence de sens peut se comprendre comme une conséquence de l'aliénation, processus par lequel les individus deviennent étrangers aux autres et à eux-mêmes. Des personnages anonymes aux teints blafards errent en étant désengagés, purement spectateurs de leur propre vie et du monde, dépourvus d’empathie et de la culpabilité face aux injustices et à la souffrance des autres, incapables de se comprendre et de communiquer et exécutant des scripts préétablis pour leur vendre des gadgets et des farces. Chaque scène, qu’il qualifie d’« image complexe », est tournée en plan fixe et sans point focal précis pour inviter le spectateur à sortir de la passivité en engageant la réflexion et en cherchant ce qui est important et pourquoi, le transformant peu à peu en observateur attentif de la vie sociale et en agent impliqué dans le monde qui peut participer activement au changement social. Son cinéma tente de prendre le contre-pied de la critique situationniste de la société du spectacle concernant les écrans qui offrent comme remède à la monotonie quotidienne l'illusion de l'action par l'identification du spectateur aux expériences de vie représentées, mais ne font en réalité que maintenir et prolonger sa passivité. « La pauvreté primitive de son projet dispense le sous-homme de chercher à le légitimer : il ne découvre autour de lui qu’un monde insignifiant et terne ; comment ce monde dépouillé susciterait-il en lui un désir de sentir, de comprendre, de vivre ? Moins il existe, moins il y a pour lui de raisons d’exister, puisque ces raisons ne se créent qu’en existant. […] Le prolétaire […] peut fuir sa liberté, la dissiper, végéter sans désir […] ; et la ruse d’un capitalisme éclairé, ce sera de lui faire oublier son souci de justification authentique, lui proposant, au sortir de l’usine où un travail mécanique l’absorbe dans sa transcendance, des divertissements où celui-ci achève de se perdre » Simone de Beauvoir, Pour une morale de l'ambiguïté.
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Créée
le 7 mars 2024
Modifiée
le 31 oct. 2024
Critique lue 72 fois
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