"Viens, maintenant, on va se faire sucer !" "Je peux pas rester sur la plage ?". Ce savoureux échange - l'un des rares mais précieux sourires qui aèrent ce "Un prophète" très intense et très sombre - pourrait permettre de rattacher Audiard fils à Audiard père si la réplique n'était aussi éloignée d'un "bon mot" comme Papa les aimait, et ne nous en disait pas autant la vérité sur son personnage. Ce qui impressionne à la seconde vision du film, c'est en effet la justesse permanente des situations, des mots et des gestes, finalement assez loin de la stylisation spectaculaire à l'américaine, plutôt dans une intériorité têtue très européenne : au final, "Un prophète" n'a rien de scorsesien comme on l'a dit, il représente plutôt un nouveau cinéma "du milieu" possible pour la France. Sauf qu'il n'est pas sûr que nous ayons beaucoup de metteurs en scène aussi talentueux que Audiard. [Critique écrite en 2010]