Le film repose à la fois sur une curieuse association et sur leur immense malentendu. Wes Craven et Eddie Murphy. C’est l’huile et l’eau, à priori. Le premier voulait sortir du genre horrifique auquel il a été cantonné, jusqu’à son dernier Freddy qui semblait crier dans chaque plan qu’il en avait marre. Le second souhaitait soudainement évoluer dans un genre différent et espérait au contact de la trempe de l’auteur de People under the stairs, pouvoir offrir des talents autres que son comique façon Le flic de Beverly Hills. C’est d’autant plus amusant de constater que dans la foulée d’Un vampire à Brooklyn, Eddie Murphy tournera Professeur Foldingue et Docteur Dolittle. Cqfd.
Je ne suis pas un grand connaisseur de la blaxpoitation mais j’imagine que les référents sont à chercher du côté de Blacula et consorts. Sauf que le film de Craven (enfin à ce stade, on serait tenté de dire qu’il est d’Eddie Murphy tant il est l’instigateur de tout) est bien trop terne (une pauvreté mise en scénique encore plus hallucinante que dans certains de ses téléfilms) et sage et s’il ose, son dérapage fait tâche au sein du reste à l’image de la scène de sermon improvisé à l’humour bien lourdingue où le vampire dans la peau du prêtre vante les mérites du Mal et du Sexe à un public approuvant sans broncher. Ridicule. Reste la transformation de son petit chauffeur/esclave, enfin sa dissolution. Le mec perd une oreille, une main, un oeil et semble bientôt sorti d’un film de Romero mais garde la pêche malgré tout. C’est le running gag du film, assez réjouissant à condition d’être indulgent.
Je pensais qu’il serait difficile à Craven de tomber aussi bas qu’il le fut pour La créature du marais. Et pourtant. Un vampire à Brooklyn est risible à tout point de vue. Eddie Murphy y est en totale roue libre, forcément. La voix off omniprésente donne envie de filer en courant. Et hormis une scène de cauchemar (encore heureux, on est dans un film de Craven) il n’y a aucune idée de mise en scène. Tout est moche, programmatique, avec des incrustations de Série Z. Je sais que Craven avait besoin de se refaire une santé financière mais là il me fait vraiment de la peine. La bonne nouvelle dans tout ça : Je suis arrivé à Scream. Je jubile.