Ida Lupino - LA FEMME They Drive By Night - chef d'oeuvre
(...) Chaque ville, chaque route, chaque arrêt, est le théâtre de nouvelles rencontres, de personnages passionnants. Plutôt caractérisés (le routier jovial, le routier bourru, la serveuse qui ne se laisse pas faire dans un monde d’hommes…) Ils sont néanmoins servis par des dialogues de haute volée qui rendent chacun important sans qu’on puisse discerner à quel niveau.
On pense d’ailleurs beaucoup à Almodóvar , et à son Femmes au bord de la crise de Nerfs, qui adoptait le même type de schéma : apporter un maximum de détails pour étayer une histoire avant de faire converger ces éléments en une conclusion imprévisible.
Le film porte la marque des films de studio typique des années 40, par les choix sobres d’angle de caméra ou encore l’interprétation. Celle-ci est encore un peu théâtrale, quoique sans faille, précise et juste.
Le film profite de ces présentations pour brosser un portrait du quotidien de l’Amérique populaire, via cette galerie de personnages tous différents, comme un organigramme social. Une Amérique pas vraiment reluisante, dans laquelle on repère deux catégories de gens : les profiteurs et les exploités. La critique politique est à ce niveau très réussie. Elle sait se faire subtile, sous couvert de comédie populaire.
Sans jamais donner dans le spectaculaire outré, Raoul Walsh rythme son film comme il rythme ses dialogues – avec un dynamisme fulgurant. Les situations sont ainsi parfois drôles, parfois plus dramatiques, même angoissantes, ou romantiques. …Un véritable film muti-genre s’installe progressivement, sans que l’on s’en rende compte.La légereté fait place à la gravité, à la réflexion puis vice-versa. Puis la romance s’entremêle avec la chronique sociale. Le feel-good-movie se transforme en… Et bien, cela reste la surprise la plus forte du film : un climax inattendu change complètement le ton du film, et l’emmène vers un extrême cinématographique impressionnant.
Tout cela serait impossible sans un casting impeccable, capable de déclamer chaque ligne de dialogue avec une intensité et une précision sans pareille.
Humphrey Bogart, classe évidemment, mais également Ann Sheridan, rousse au tempérament volcanique, et surtout Ida Lupino. L’actrice à qui est dédié cette « histoire permanente des femmes cinéastes » s’impose progressivement par son jeu sobre au sein d’un casting qui nous bluffait déjà… Elle finit par remporter la mise, dans une composition extraordinaire, mais remarquablement introduite – aidée, il est vrai, par l’écriture au cordeau de son personnage. Ce qu’elle a en plus, c’est cette faculté, comme tous les grands interprètes, à comprendre parfaitement son personnage, et à l’incarne jusque dans le détail. Lana Carlsen, une femme inoubliable.
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