Voilà véritablement la surprise dans le rayon exploitation militaire, qui parvient à surprendre tout en offrant un spectacle réjouissant, et une formule en tout cas originale, vu qu’on s’attendait à des inspirations du précédent chef d’œuvre. Le film de Castellari s’accorde plus de libertés. En effet, les personnages principaux du film sont des déserteurs de l’armée américaine, prisonniers dans un camp en France en plein département des forces américaines. Les mutins, tenus par les troupes des Alliés, sont transférés vers un tribunal militaire. Mais au cours de leur transfert, leur convoi est attaqué et détruit par un avion allemand. Inglorious bastards, c’est donc l’histoire de déserteurs qui vont tenter de rejoindre la Suisse en traversant la France, où le danger vient à la fois des troupes allemandes et des troupes alliées, autorisées à exécuter les déserteurs. Voilà un potentiel pour un film d’aventure sobre et suffisamment bien exécuté pour s’attirer la sympathie du public. Si la pose des caractères est à la va-comme-je-te-pousse, on identifie assez vite les personnages attachants, et c’est avec nos déserteurs que nous allons entamer un périple long et périlleux, qui ne sera d’ailleurs pas avare en pyrotechnie. C’est sur ce point que le film se révèle surprenant : il a bénéficié de suffisamment de budget pour s’autoriser l’usage de beaucoup de matériel militaire, nous gratifiant de très nombreuses gunfights qui viendront épicer les nombreux arrêts de notre troupe. Toutefois, et il est important de le souligner, pas mal d’effets spéciaux qui auraient coûté cher sont réalisés sur des maquettes. Les maquettes en elles-mêmes sont réalisées avec soin, mais les ralentis des explosions sont parfois hasardeux, et surtout les flammes trahissent immédiatement les incrustations (réussies). Dommage, le dernier acte nous offrant l’explosion d’un convoi ferroviaire, sensée être impressionnante mais ayant aujourd’hui mal vieillie.
Toutefois, si l’intrigue est parfois un peu abracadabrante, le scénario est suffisamment malin pour explorer des pistes intéressantes, comme celle du soldat allemand lui aussi déserteur qui rejoint le groupe et propose de les guider (assurant ainsi une couverture en cas de rencontre avec les soldats nazis). Les camps disparaissent pour les mutins, et les concepts de cohésions de groupe sont quant à eux fluctuants (ainsi, certains bastards essayeront de fuir en donnant le reste du groupe). Ce parcours de déserteur est imprévisible, aléatoire et par conséquent, leur parcours comporte leur lot de temps forts et de suspense, chaque arrivée de soldat déclenchant une bouffée de stress. Heureusement, le film ne s’attarde pas trop dans cet état de risque perpétuel, puisque par un concours de circonstance, nos gaillards sont bientôt recueillis par la résistance française (la présence d’un noir dans leur rang sera d’ailleurs déterminante), qui les embarque dans des missions de sabotages, auxquelles ils participeront (cela les rapprochant de la frontière). Se ménageant une petite digression dans une forteresse française encore tenue par les nazis (avec évasion en tyrolienne), le film a au final tous les ingrédients nécessaires à un bon divertissement de guerre, ne négligeant pas non plus l’humour. Moins agressif que Les douze salopards vis-à-vis de l’armée, mais avec quelques bons moments qui pourront marquer les esprits (la séquence assez drôle des allemandes nues sur lesquelles se jettent les bastards, mais qui hurlent en voyant le noir de l’équipe…). Si le résultat a aujourd’hui un peu vieilli, Inglorious Bastards n’a rien à envier à son (faux) remake de Tarantino, le résultat se révélant être un très agréable divertissement, qui pourrait être comparé à une sorte de Septième compagnie avec beaucoup moins de vannes et beaucoup plus d’action.