Après une incursion réussie dans l'animation avec "Le Magasin des suicides" (2012) voici le retour de Patrice Leconte qu'on avait un peu perdue depuis le magnifique voyage sensoriel "Dogora" (2004) malheureusement passé trop inaperçu... Finalement Leconte n'est jamais aussi bon que dans le drame romantique (rappelons-nous "La Veuve de Saint-Pierre" et "La fille sur le pont" entre autres) et il y revient avec ce film adapté d'une nouvelle de Stefan Zweig "Le Voyage dans le passé" parue en 1929. Une histoire allemande transposée en langue anglaise... On se demande bien pourquoi ?! Outre une raison commerciale on ne voit pas, la langue allemande, bien particulière nous aurait encore plus plongé dans l'époque 1912-1920. La 1ère Guerre Mondiale est certe survolée, et c'est bien puisque ce n'est qu'un paramètre historique et que c'est nullement le sujet du film. Néanmoins la conscience et le poids de la défaite, l'histoire se déroulant en Allemagne il aurait été de bonusage de garder la langue originelle sinon pourquoi pas le français ?!... Bref ce n'est qu'un détail qui nous amène par conséquence à un casting tout anglophone mais qu'on ne peut que saluer. Alan Rickman qu'on ne présente plus, Richard Madden (découvert via la série tv "Game of Thrones") et la ravissante Rebecca Hall forme une triangulaire idéale et magnifique au film voulu par Patrice Leconte. L'oeuvre de Stefan Zweig est profondément pessimiste, si Patrice Leconte a arasé ce sentiment (le retour de Louis est un peu moins "problématique") il n'en demeure pas moins qu'il en a gardé une certaine mélancolie évitant (ouf !) le véritable happy end. La belle idée du réalisateur est d'avoir placé les silences, les non-dits et les effleurements au centre de sa mise en scène, laissant aux dialogues une place juste nécessaire. Le jeu des interprètes est juste parfaitement en symbiose avec les cadrages, on sent une direction d'acteur au diapason ; en témoigne d'ailleurs l'acteur Alan Rickman qui a remercié son réalisateur... Les gestes et la frilosité des corps et des âmes touchent au coeur dans cette passion qui n'est pas sans rappeler quelques autres grands classiques du Romantisme. En tous cas il s'agit du meilleur film de Patrice Leconte depuis au moins une décennie.