"L'homme est un animal lubrique." ( anonyme )
Adage qu'il n'était du reste plus besoin de prouver, ce que se charge de nous rappeler le fascinant document du regretté Jean Eustache, objet détonnant en forme de dyptique confrontant deux récits-jumeaux, d'une part sur le mode de la fiction, d'autre part sur celui du documentaire.
En partant d'un dispositif pour le moins rudimentaire ( un texte, une caméra, un narrateur et un décor unique ) Jean Eustache laisse donc la parole à un pervers aguerri, nous contant sa sale histoire avec un naturel pour le moins frappant. L'écriture de son témoignage, extrêmement fine, redoutable et même souvent très juste rend parfaitement visible l'expérience déviante de ce parisien ayant été à bonne école...
il y a du Pasolini dans ce métrage efficace sur toute la ligne, dans cette manière de scandaliser le bourgeois, de l'inonder de sa verve moins provocatrice qu'elle ne le semble et particulièrement authentique. En s'interrogeant sur la représentation de son récit ( Une sale histoire montre pertinemment les limites de sa probité en suggérant, par l'entremise de sa partie fictive, les difficultés éprouvées à fabriquer de la réalité par les moyens du Cinéma ) Jean Eustache ne sortira jamais du salon au coeur duquel Jean-Noël Picq puis Michael Lonsdale pratiquent leur monologue... C'est d'une maturité et d'une intelligence trop rares pour s'en dispenser.
Un film court, limpide et de fait passionnant, remarquablement habité par ses deux intervenants. Sans fioritures et d'une obscénité presque anti-pornographique Une sale histoire demeure, à l'instar du Maîtresse de Barbet Schroeder et du cinéma de Jean-Pierre Bouyxou, un film aimablement moderne et d'un courage salutaire. J'ai énormément apprécié.