Alléluia !
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Après seulement deux longs-métrages – l’excellent Shallow Grave et le culte Trainspotting – l’écossais Danny Boyle est invité par Hollywood à clore sa trilogie Bag Of Money au cœur des grands espaces de l’ouest américain. Pour ce faire, après deux volumes autour de l’amitié et toujours avec l’excellent Ewan McGregor, le réalisateur et son scénariste John Hodge s’attaquent là à l’amour dans une comédie romantique acide et décalée, déjantée british style, et nous racontent l’imprévisibilité inexorable des sentiments.
Du paradis, poste de police d’un blanc immaculé, deux anges sont envoyés sur Terre pour s’assurer de rassembler un homme et une femme qui s’aimeront d’un véritable et inaltérable amour malgré les dommages irrémédiables causés à ce sentiment noble par la décadence contemporaine des sociétés de consommation. Mission leur est confiée de créer les conditions indispensables des voies impénétrables de l’amour…
En bas, Robert perd son boulot minable, sa copine serveuse partie avec un autre et sa dignité, avant de se faire racketter par les huissiers et expulser par son propriétaire. Au bout de ce qu’il peut endurer, irrésistible impulsion, il s’introduit dans le bureau du patron qui l’a remplacé par un robot, sans plan préalable, et en ressort, loser intégral emporté presque malgré lui dans une prise d’otage hilarante, flingue sur la tempe de Celine, la richissime fille de celui-ci.
Dans un château en Écosse. C’est en Angleterre. Près de Paris.
Le Bag Of Money ici, c’est la rançon payée par le père. Comme d’habitude, ce n’est qu’un prétexte à étudier les interactions humaines, mais après la désagrégation des amitiés, c’est aux mystères autant qu’aux dangers de l’amour que le cinéaste s’attaque dans une romance aux allures de syndrome de Stockholm à l’envers : Celine est le ravisseur, Robert le kidnappé.
mais la force brute des personnages fait son effet et c’est bien de cette irrésistible attirance qu’ils se refusent que naissent la comédie autant que la romance. C’est bien le rythme vivant de leurs interactions, le temps qu’ils se jaugent et se testent, qui emballe un récit plutôt traditionnel.
Les séquences offrent aux comédiens de très belles performances tant les sentiments sont explorés dans les extrêmes, tant les situations sont incongrues, irréelles et sublimes. Tête d’affiche attitrée du cinéaste, Ewan McGregor amène cette folie retenue, humble, à son rôle de loser magnifique, compose dans la simplicité tous les travers d’un anti-héros dont on ne peut que s’éprendre et tient en grande partie le contraste qui explose littéralement tout le fil du film. Cameron Diaz, qu’on l’y apprécie ou non, explore avec justesse le sadisme frustré de la petite fille riche haïssable et contrebalance à merveille et avec brutalité, la tendre niaiserie de son partenaire. Dans leurs pas, Holly Hunter et Delroy Lindo campent la détermination et l’ennui de deux anges ordinaires, dépassés par les évènements malgré leur implication de (presque) chaque instant. Puis il faut souligner les plaisirs d’un Ian Holm avide aux élans psychopathes, d’un Tony Shalhoub en barman sympathique, d’un Dan Hedaya en Gabriel dépassé par l’absurde désespérant de son boulot ou d’un Stanley Tucci en gendre idéal imbu de lui-même.
Porté par un casting de choix et tout en appliquant minutieusement les codes de la comédie romantique américaine – le postulat de base avec deux personnages que tout oppose, le scénario aux passages obligés pour mettre en exergue les attirances et les répulsions réciproques, la chanson qui rapproche malgré ce qu’ils s’avouent, l’humour imbécile et la mièvrerie – le cinéaste écossais y ajoute une grosse dose de l’humour acide qui fait sa marque et une autre de profondes noirceurs dans l’âme humaine pour finalement les exploser allègrement dans
En explorant avec une jubilation évidente les voies impénétrables d’un genre à part entière dans le cinéma hollywoodien, Danny Boyle prend un malin plaisir à se mettre en danger sur le fil incongru d’une revisite explosive. A Life Less Ordinary n’est pas son meilleur film, loin de là, mais il atteste d’une maîtrise de la grammaire cinématographique jouissive et de l’indéniable plaisir que le réalisateur prend à ciseler même ses récits les plus anodins pour offrir confortablement aux spectateurs
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Créée
le 13 janv. 2017
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