Comment choper des ampoules… aux yeux !
Ce film m'a été chaudement recommandé pour ses qualités graphiques. Et c'est vrai qu'il y a de quoi, toutefois sur le papier !
Avec cette idée d'une planète du haut et d'une du bas et l'amour interdit qui s'en suit, il y a de quoi séduire. On dirait que le spectre de "Metropolis" n'est pas très loin (toutefois, la comparaison s'arrête là).
Me voilà donc assez emballé au début. Les plans larges et les dégradés dans le ciel font leur effet dès le prologue et la situation impromptue de ces mondes renversés permet un jeu de mise en scène et de choix de cadres auxquels nous ne sommes pas habitués. L'histoire, quant à elle, est simpliste et prévisible au possible, avec ses grossièretés et improbabilités propres aux films-spectacles de ce genre, mais ça fait partie du jeu, et fait normalement même un peu le charme de ces blockbusters…
Je dis normalement car, malheureusement, qu'est ce qu'on s'ennuie ! Passé le stade où on s'est habitué à la situation et aux plans à l'envers, forcé de constater que le rythme n'y est pas, que tout traine en longueur de manière quasi sadique. Chaque plan souligne à l'excès, d'un bout à l'autre, la situation, de peur que "bébête spectateur-lambda" pas avoir encore compris principe. Et le cinéma qui s'écrit en partant du principe que son public est con (même si on en est pas encore au point de Pacific Rim ici), ça a tendance à m'irriter.
Sans même parler de ce point, il y a là un problème dans le principe d'immersion : qu'on prenne le temps de nous montrer en quoi le monde créé est ici original, histoire qu'on soit pas confus au début, c'est très bien. Mais il y a un moment où il faut lâcher, si on veut s'intéresser à l'histoire, il faut que le point de vue se mette à égalité avec les personnages qui vivent les situations !
Par exemple, heureusement que, dans Star Wars, G. Lucas n'a pas essayé de nous impressionner une nième fois quand Luke et son père (spoiler…) dégainent leurs sabres laser pour en découdre… On sait comment ça marche, on nous a fait le coup une fois, on passe à autre chose, l'enjeu est le combat en lui-même !
Mais, pour en revenir à Upside Down, peut-être faut-il voir dans cette insistance de tous instants la volonté qu'on ne s'intéresse pas au reste du film justement. Scénario étiré à n'en plus pouvoir, jeu peu convainquant que même Kristen Dunst ne parvient à rattraper (je ne ferai pas l'affront de mentionner celui du protagoniste masculin…), et des défauts de montage à faire pleurer un reptile.
À ce propos, j'ai bondi sur les ellipses du dernier quart du film : alors que, depuis le début, ils étirent toutes les actions, les enrichissent de gros plans à n'en plus pouvoir pour bien tout illustrer, le rythme change totalement sans que la narration ne le justifie. J'ai la nette impression qu'un certain nombre de séquences ont été supprimées tout bonnement, sans doute un tour des méchants producteurs qui savent qu'on vend mieux un film s'il est court. Et comme c'est plus simple de trancher dans le lard que de retravailler l'ensemble du rythme du film, ils ont sacrifié la cohérence esthétique de l'ensemble. Dommage.
Alors oui, il faut cacher tout ces défauts, à coups de plans saturés, de flares improbables et démesurés et d'un incessant aplat musical qui est sensé unifier, lier les séquences entre elles… Autre tendance dangereuse du cinéma hollywoodien actuel, qui oublie que la bande-son sert aussi les principes esthétiques d'un film et n'est pas une simple guimauve, ou pâte gluante permettant à l'ensemble de tenir tant bien que mal.
Ayant mal aux yeux et aux oreilles, j'ai toutefois gardé en tête quelques petits moments de grâce qui m'avaient séduit. Certains "tableaux" sont beaux en soi et feraient presque oublier l'atroce et ridicule séquence de fusillade dans le "chantier", vers la toute fin. D'où une première note sympa de 5/10. Mais, en y repensant, ça me met de mauvais poil, et j'insulte certains films auxquels j'ai attribué la même note. Alors va pour un (petit) 4.