Après un début de carrière à la télé et dans la comédie, puis un Oscar du meilleur scénario original pour son premier film, Get Out, Jordan peele confirme qu’il est le maître de l’horreur avec Us. Plus qu’un simple film de genre, Us se révèle en tant qu’oeuvre sociale et politique, dotée d’un brin d’humour.
Le réalisateur y raconte l’histoire d'Adélaïde Wilson (Lupita Nyong’o), une mère de famille en vacances sur la côte Ouest avec son mari, Gabe ( Winston Duke) et ses deux enfants. Ils y retrouvent leurs amis, les Tyler. Leur beau séjour est de courte durée car en pleine nuit, ils deviennent la cible d’une autre famille qui s’avère être leur double.
Comme dans tout film d’horreur, Peele à grand renfort de scènes angoissantes, joue sur des codes primaires, ceux qui activent la peur chez les spectateurs. La première séquence et ses jeux de miroirs mettent directement dans l’ambiance. Cela se poursuit avec la première demi-heure qui sert à présenter la famille ainsi qu’à montrer que quelque chose va se passer, on le voit avec la scène de la plage où Adélaïde, joué avec prouesse par Lupita Nyong’o, se met à paniquer lorsqu’elle perd son fils de vue. Le cauchemar arrive lorsque vient la nuit et qu’une famille s’introduit dans leur maison de vacances et les terrorise. On est dans le “home invasion” à la Funny Games, Martyrs ou même le premier American Nightmare. La tension et l’angoisse débarquent alors vraiment grâce à la musique électrisant ainsi qu’une mise en scène, élégante et efficace, multipliant les plans-séquences et qui favorise l’immersion. On peut également noter la performance magistrale de Lupita Nyong’o. Peele utilise tous les codes du film d’horreur et plus spécifiquement du “home invasion”, et nous offre une oeuvre encore plus maîtrisée et plus marquée dans son genre.
Bien que Us suit des codes très précis, on voit qu’il se démarque et que Peele impose une nouvelle fois son style. En effet, c’est non sans humour que le réalisateur confectionne ce drame identitaire, croquant des personnages plein de second degré, à l’image de Gabe joué par Winston Duke. Le réalisateur a voulu apporter cette touche d’humour de lui-même; même si on est devant un film d’horreur plein de tension et angoissant, on rit également. Ce n’est pas un hasard si Peele a pris pour second rôle, l’acteur et humoriste Tim Heidecker. Il semblerait que le désir de Jordan Peele de réaliser son long métrage avec une pointe d’humour et de second degré, est d’amener avec ce dernier le message politique et sociale tout comme il l’avait fait dans Get Out. En effet, Peele avait inclus un message politique et social dans son premier film contre le racisme aux Etats-Unis. Il le fait également avec Us, où ici la lutte des classes est un des sujets les plus importants. Avec ce second degré assumé, Peele nous dit bien que le film n’est pas à prendre tel qu’il est et qu’il y a quelque chose de plus grand derrière ce film d’horreur. Cela le rend singulier, le fait qu’il soit efficace dans l’horreur et intelligent dans son propos de fond. Le réalisateur avec ce film a définitivement imposé son style.
Dans dix ans voire plus, on se souviendra de Us comme la confirmation d’un réalisateur prometteur. Le film ne se contente pas de ce qu’il est, il va bien plus loin que ce dont nous étions habitués dans ce genre de films. Le réalisateur revisite en effet plusieurs sous genre dont le “survival” à partir de la deuxième partie avec également par moment un rapprochement aux films catastrophes ou apocalyptiques. On peut dire que si le long-métrage de Jordan Peele est une réussite c’est parce que le cinéaste ne s’est pas reposé sur ses acquis et a voulu proposer quelque chose de plus grand à son public. Il nous fait peur, rire et réfléchir, on peut se demander si le réalisateur sera capable de nous proposer autre chose à l’avenir ?