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6.3
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Film de Jordan Peele (2019)

[ # 93 - Nous , lapins et tunnels ]

Après le prometteur et oscarisé Get Out qui avait donné un nouveau souffle au cinéma de genre horrifique et qui s'inscrivait dans un mouvement plus que prometteur au sein même du cinéma indépendant américain , dans la mouvance d'autres gros noms comme Ari Aster , Robert Eggers et David Robert Mitchell entre autres , Jordan Peele se devait de confirmer avec le très ( trop ? ) attendu Us.


De retour dans sa maison d’enfance, à Santa Cruz sur la côte Californienne, Adelaïde Wilson a décidé de passer des vacances de rêves avec son mari Gabe et leurs deux enfants : Zora et Jason. Un traumatisme aussi mystérieux qu’irrésolu refait surface suite à une série d’étranges coïncidences qui déclenchent la paranoïa de cette mère de famille de plus en plus persuadée qu’un terrible malheur va s’abattre sur ceux qu’elle aime. Après une journée tendue à la plage avec leurs amis les Tyler, les Wilson rentrent enfin à la maison où ils découvrent quatre personnes se tenant la main dans leur allée. Ils vont alors affronter le plus terrifiant et inattendu des adversaires : leurs propres doubles.



J'ai aimé




  • Une photographie et une réalisation sublimes et maitrisées

  • Elisabeth Moss

  • Une musique surprenante et engageante

  • Des références qui ne virent pas à l'indigestion



J'ai moins aimé




  • Un manque de rythme évident

  • Un humour qui dédramatise et annule toute tension

  • Certains personnages tout bonnement insupportables

  • Incohérent et lourd

  • Politique à outrance

  • Trop d'explications vaseuses qui complexifient plus qu'autre chose le film

  • Aucune tension , pas même de la peur

  • Des performances parfois risibles

  • Un twist final incohérent et inutile



Funny Games US



Dans son second film Jordan Peele démontre qu'il a un style bien à lui et parfaitement reconnaissable et ce , en seulement 2 long - métrages. Images parfaitement composées , empreintes de symétrie conjuguées à un travail de l'ambiance constant. Il y a une dimension résolument viscérale dans le style du réalisateur , quelque chose qui touche à notre enfance et à des peurs longtemps enfouies. Le film est d'ailleurs parsemé comme son prédécesseur d'images marquantes qui démontrent une réelle envie de proposer des images fortes qui vont baliser l'oeuvre et créer toute son identité. L'importance des regards des personnages apporte une grande humanité à ceux - ci , ce qui était déjà le cas dans Get Out. A cela s'ajoute une photographie impressionnante de maîtrise qui magnifie une réalisation de haut vol. Le film travaille d'ailleurs tout du long les jeux de miroirs et de reflets inversés , poussant d'ailleurs ce travail à son paroxysme tant tout renvoie à quelque chose de bien défini ou sert à un but bien précis. On sent au niveau des influences , en plus de La Quatrième Dimension dont Jordan Peele avait déjà parlé , le travail de Kubrick sur Shining ou celui d'Haneke sur Funny Games sans pour autant faire de son film une pâle copie sans âme. La musique apporte une réelle atmosphère à l'ensemble et reste en tête , portant des scènes qui n'auraient pas grand chose pour elles sans.



Nous ou Eux



Ce qui ressemblait à une belle proposition de cinéma se prend les pieds dans le tapis de ses ambitions et de la précipitation. Au delà d'un rythme bâtard ne décollant jamais , le film pêche dans des tics d'écriture problématiques. L'humour , composant essentiel de Get Out , est ici constamment en train de plomber le rythme du film et l'ambiance qu'il parvient difficilement à instaurer. Le comportement des personnages n'est jamais réellement crédible , certains balançant des vannes en pleine situation de tension , d'autres ne semblant jamais être inquiets de ce qui leur arrive. Jordan Peele ne parvient jamais à se séparer de son humour qui ne colle tout simplement pas à cette atmosphère et à ce message bien plus amère que celui de son premier film. Le film n'effraie jamais et ne parvient pas à maintenir efficacement une tension et une sensation de danger permanent


( l'impression que la famille principale est véritablement en danger et peut perdre quelqu'un en cours de route n'apparaît jamais , ce qui se vérifie à la fin )


La partie " home - invasion " ne prend jamais car s'arrête trop vite et le film devient un survival mou trop concentré sur son message que sur le film qui se déroule. Message qui , en plus d'être particulièrement fouillis , prend trop le pas sur le reste , enlevant de la subtilité à l'ensemble et en y rajoutant un bon lot d'invraisemblances. Difficile en effet de croire à ce que le film nous montre tant il grille ses cartouches trop vite


( le panneau de texte du début n'a pas sa place et en dévoile trop dès le début , tout comme la scène d'introduction qui manque cruellement de subtilité sur sa fin )


Le film ne réussit donc jamais ce qu'il veut faire soit par excès de confiance soit par manque de rigueur , plombé par une promo qui en dévoilait trop , et une précipitation d'exécution qui nuit un concept dont les explications enfoncent le manque de logique et de cohérence de l'ensemble. Autrement plus inquiétant , le film devient une parodie du style de Peele et exacerbe dans son avancée jusqu'à un final beaucoup trop alambiqué pour le peu qu'il montre , le film tombant d'ailleurs beaucoup trop souvent dans le ridicule qui tue des films. Plus qu'un film de genre avec un fond politique , c'est un film politiquement lourd qui ignore le genre. Comble de la blague , le twist final parvient même à être parfaitement inutile à l'ensemble qui finit dans le flou le plus total. Plus grave encore , ce cinéma se voulant diversifié dans son casting et empreint d'une conscience sociale forte se retrouve à intensifier contre sa volonté les divergences et présente un portait qui dérange des blancs


( ils sont montrés dans ce film comme particulièrement passifs , imbus d'eux - même , gangrenés par la société de consommation et meurent tous avec une rapidité consternante alors que la famille principale rester entière , même les doubles de la famille principale meurent de manière moins frontale et outrancière )



Faire rire ou avoir peur



Les acteurs ne sauvent malheureusement pas l'ensemble , plombés par l'écriture de leur personnage dont certains qui n'évolueront jamais du film ou d'autres restés à l'état de cliché. Elisabeth Moss arrive cependant à donner une prestation réussie malgré les miettes qu'elle a et Lupita Nyong'o , malgré le fait que sa performance est surestimée , fait de son mieux et cela se voit.



Double échec



Constat consternant que cet échec à la fois scénaristique et politique qui fait douter des capacités de Jordan Peele et démontre une tendance à porter aux nues des créateurs et les proclamer " génie " un peu trop vite. On peut ne pas aimer et avoir compris le film. On peut aimer le cinéma d'horreur et considérer ce film comme un raté. Et oui.

DrOwl370
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le 18 janv. 2020

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DrOwl370

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