Vous aurez beau mettre de la chantilly sur de la merde, ça ne la rendra pas plus comestible.
Et vous aurez beau noyer une daube cinématographique sous des effets numériques, ça ne lui donnera pas plus de chance de décrocher un Oscar.
Rappelons que Abraham Van Helsing est à la base un personnage créé par l'écrivain Bram Stoker dans son roman Dracula. Ce professeur, fin connaisseur des créatures surnaturelles, assistera Jonathan Harker et le Dr Seward dans leur lutte contre le sinistre comte. Personnage charismatique, Van Helsing s'est vu par la suite développé dans des adaptations plus ou moins heureuses du récit original, jusqu'à devenir un héros à part entière, notamment dans le film qui nous occupe.
Vacances en Transylvanie
Van Helsing nous revient donc, incarné par l'acteur australien Hugh Jackman, dans un rôle d'intrépide chasseur de démons, à la nuance près que si le roman nous le présentait comme un professeur d'université calme et réfléchi, il passe ici pour une brute à belle gueule, le genre qui défouraille à tout va en sautillant comme un Yoda sous ecstasy avant d'emballer la belle du coin (incarnée par Kate Beckinsale parce que c'est bien connu, habiter un bled paumé de Transylvanie n'a jamais empêché la châtelaine locale d'avoir un sourire Pepsodent et une peau de pêche.) Le tout au milieu d'explosions joyeuses, d'éclairs farceurs, de jets de flammes rigolos, de brouillards opaques, de démons ailés allumés... Qui a parlé de lourdeurs ?
Alors, sorti des effets spéciaux à la louche (et pas tous des plus habiles) et de la brochette de belles gueules, que nous reste-t-il ? Ben pas grand-chose en fait. Le scénario, franchement grotesque, nous présente Van Helsing comme une sorte de James Bond du XIXème siècle au service du Vatican, à la poursuite des plus infâmes créatures infernales, de Mr Hyde au loup-garou en passant par la créature de Frankenstein. Envoyé en mission au coeur de la Transylvanie pour aider les gars du coin à tuer Dracula parce que sinon ils pourront pas aller au Paradis à cause d'une malédiction familiale (je m'abstiendrai de commentaire sur l'originalité du script), bardé d'arbalètes à répétition et de crucifix-shuriken, Van Helsing débarque comme un éléphant en rut dans un magasin de porcelaine pour péter la gueule à tous ces vilains monstres qui font rien qu'à l'embêter, c'est trop injuste.
Le film s'étale ainsi sur deux heures, alternant sur un rythme assez régulier les scènes de baston et de séduction, tandis que le scénario s'enfonce peu à peu dans un délire psychotrope de plus en plus effarant. Pour le coup, Stephen Sommers devait quand même être piqué à quelque chose de pas très net, car si l'idée de base de mêler au sein d'une même histoire diverses créatures bien connues ne manquait pas d'intérêt et offrait de multiples possibilités, il en fait ici une sorte de soupe franchement indigeste dont je me servirais plus volontiers pour déboucher mes toilettes.
En bref, nous sommes donc ici en face d'un parfait exemple de daube parfaitement ridicule mais qui a le malheur de se prendre au sérieux et pour un bon film. Si vraiment l'envie masochiste vous venait de le visionner, suivez au préalable ces quelques conseils : invitez quelques potes, rangez votre cerveau, bourrez-vous la gueule et commandez quelques pizzas dégoulinantes avant de vous marrer chaque fois que Dracula part dans un de ses délires...