Quand un film français tente de sortir des sentiers battus avec une invasion d'araignées dans une cité crasseuse, ça mérite qu’on s’y attarde. "Vermine" se distingue tout d'abord par son casting solide, avec Jérôme Niel qui incarne parfaitement son personnage. Pour une fois, on n’a pas l’impression d’assister à une pièce de théâtre télévisée mal jouée. La musique, elle, colle impeccablement à l’ambiance, oscillant habilement entre drame et frissons. Mention spéciale à la bande sonore qui enveloppe tout le film dans une tension palpable, ce qui, soyons honnêtes, est rare dans le cinéma français de genre.
Visuellement, c’est un régal... enfin, si on aime le gris, le sale et le glauque. L’étalonnage est magistral. Le gris prédominant et cette lumière froide renforcent l’atmosphère étouffante du film. Côté déco, c’est ultra-crédible : la crasse, on la sent presque sous nos ongles, que ce soit avant ou pendant l’invasion des araignées. L’univers crade est tellement bien planté qu’on finit par être presque plus mal à l’aise à cause de l’environnement que des bestioles elles-mêmes. On suffoque littéralement avec les personnages.
Mais voilà... là où ça coince, c’est qu'après un début prometteur, le film semble se reposer un peu trop sur ses acquis. On retrouve plusieurs fois la même mise en scène : une voie sombre, et boum, une vague d'araignées qui déboule. Une fois, c’est cool, ça marche. Deux fois, pourquoi pas. Mais au bout de la troisième, la tension tombe, et on commence à décrocher. Le suspense s’essouffle et on finit par deviner les schémas. Le film aurait clairement pu mieux faire à ce niveau, surtout pour un film qui joue sur la claustrophobie et la peur.
Heureusement, la fin relève un peu le niveau, avec une idée intéressante où les flics deviennent indirectement un danger pour nos héros. C’est d’ailleurs l’un des points forts du film : on s'attache assez vite aux personnages. Leur écriture est crédible et le jeu des acteurs les rend vraiment humains. On comprend leurs choix, leurs erreurs, même si… et c’est là que ça coince pour le protagoniste principal. Ce gars… franchement, il a ramené la merde, littéralement. Quand il voit un personnage âgé, adorable au passage, infecté et appelant à l’aide, il ne réagit pas. Aucun remord, aucune émotion. Ok, pragmatique, pourquoi pas. Mais à ce niveau-là de gravité, un minimum de culpabilité aurait été bienvenu. Pareil quand son ancien meilleur ami y passe, on attend un peu d’émotion, mais rien. Ce manque de profondeur chez le protagoniste rend certains passages frustrants.
Le scénario, quant à lui, essaie de proposer une sorte de métaphore entre les habitants des banlieues et les araignées. Un message sur la peur de l’autre, le rejet, peut-être. Mais honnêtement, c’est flou et mal exploité. Le film aurait pu en dire bien plus avec un peu plus de clarté dans son propos.
Pour conclure, "Vermine" a des idées originales et une ambiance visuelle maîtrisée, mais il tombe dans la répétition et laisse certaines pistes inexploitées. Dommage, car avec un peu plus d’audace, il aurait pu marquer les esprits. Comme beaucoup de bons films français, il risque hélas de passer vite aux oubliettes, malgré son potentiel.