Il y a de très beaux moments, mais l'impression que le surplace se fait sentir après un monument comme Shokuzai reste tenace, tout le long de la séance, malgré le fait que le pouvoir de hantise de ce dernier cru soit très fort, non seulement par ses images, mais également par son univers sonore.
Le fait est que, s'il y a des thématiques très importantes (la lumière, l'espace, l'oubli...) elles sont trop visibles voire même trop théorisées sur des moments clefs du film. Quelque part la lecture y est un peu trop facile, sans doute aidée par le fait que ses précédents longs-métrages interrogeaient déjà très largement la notion d'aide des vivants par le flux spirituel des trépassés, sans forcément la touche tragique de Shokuzai ni même ses moments les plus absurdement drôles, sans la fantaisie chic de Real où le trépassé était simplement un comateux. Au final, c'est bien d'être mort, on a plus du tout de soucis : on a plus que le vide et l'attente devant soit, mais tout tourne autour des problèmes de mémoire et d'amour chez ce Kurosawa en particulier, et la redondance des micro-situations finit par lasser.
Il y a bien sûr, de très belles idées de mises en scène, et un curieux contraste en terme de couleurs par rapport aux derniers films qui frôlaient la grisaille. Ici, les murs sont recouverts de pétales flamboyants et les rives sont bordées par des prairies d'un vert vif, les cascades animées par une eau scintillante.
Et (enfin) il... Il y a une scène magnifique qui surnage le tout ; lorsque d'un coup la brume envahit le cadre et qu'un couple se vautre dans l'herbe pour se livrer à un jeu de dupes mi fantôme mi humain.
C'est très beau, et assez troublant au regard des analogie que l'on peut y faire avec les personnages que l'on côtoie tous les jours dans nos propres vies, sans doute il reste à ce long-métrage élégant et profond cette mystérieuse procession sentimentale qui ne finit jamais, ce calme de l'Olympe où les vivants et les morts se regardent indifférents, perdus, des deux côtés de la rive.