" Le bonheur de perdre... pour mieux retrouver..."

Les sensations sont toujours au rendez vous, après le goût dans les délices de Tokyo, c'est maintenant au tour de l’ouïe et du toucher.
Naomie Kawase, avec sa caméra subtile et poétique, nous fait découvrir le monde des malvoyants et des aveugles, à travers l'histoire de Misako une audio rédactrice qui par les critiques de consultants aveugles , remet en question ses propres limites et affrontent ses démons passés et présents.


Bien sûr la manière de filmer est déstabilisante, nous sommes trop proches, trop près, c'est très perturbant ces gros plans, cette proximité. On souhaiterait faire un bon en arrière et pourtant cette façon de déstabiliser notre espace, n 'est ce pas la meilleure manière de nous faire ressentir ce que les protagonistes ressentent?
La mise en scène est exceptionnelle en cela. Des bruits, des souffles, de l'eau, des froissements, qui sont amplifiés, des repère spatiaux qui nous perturbent, des voix qui résonnent. Ce film est aussi très tactile, caresse des visages, palpation du cuir, des barres métalliques ... On serait presque à leur place. Il n'y a presque pas de jeu d'acteurs, seul leurs regards, leurs voix, leur souffle suffisent.
Le scénario est simple, quoique les histoires secondaires sont abordées beaucoup trop superficiellement même l'histoire d'amour, c'est ce que je reprocherais à ce film.


Mais au final le sujet dramatique, de la perte est abordée intelligemment et de manière originale. Perte de l'être aimé, perte du père, perdu dans la forêt, perte de la vue, perte de la photographie... Les multiples mises en abîmes renforcent le sentiment de fatalité et de perte ( photos, photographe, film sur le deuil...)


Mais derrière ces tragédies, l'espoir semble toujours présent. C'est en tout cas ce que m'a fait ressentir l'incroyable jeu de lumière perçu durant tout le film. La prédominance de cette lumière chaude, dorée, réconfortante qu'est celle du soleil couchant, omniprésente dans le film ( fenêtre, paysage, feu, photographie, feuille, prisme... ) cette lumière parfaitement travaillée, découpe les paysages, passe au travers des trous, des contours, porte en ombre chinoise les hommes, les arbres, la vie, et domine sur toute chose, comme si le reste était finalement futil et relatif. Cela est aussi mis en évidence dans la mise en abyme créée par le film dans le film. Cette lumière elle, on ne la perdra jamais, c'est elle qui un jour nous perdra.
On finit toujours par retrouver, quoi que l'on soit perdu ( on retrouve l'amour, on retrouve sa fille, on retrouve de nouvelles sensations...)


Malgré un scénario à peine trop simplifié sous certains aspects,ce film fait vibrer et nos sens par une mise en scène extrêmement originale et osée, et nos émotions, nous faisant passer de la tristesse à l'espoir à l'aide d'un simple regard et d' un éclat d'une nouvelle lumière. Et c'est vers elle qu'il nous faut nous tourner.

RoideTrêfle
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le 13 janv. 2018

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