A 69 ans, Nanni Moretti est plus jeune que jamais. Avec Vers un avenir radieux, titre programmatique quant à son optimisme, il délivre pas moins de 3 films en un, comme l'aveu testamentaire d'un artiste au crépuscule, grimé en trublion romantique et bougon, "allenien" jusqu'à la moelle.
Impossible de ne pas voir en ce personnage de réalisateur de films aussi odieux qu'attachant, pétri de principes artistiques comme politiques, un alter ego attendrissant de Moretti, regardant, sourire aux commissures, son passé, ses manqués, dévoué à transmettre et réécrivant avec jubilation la grande Histoire comme sa propre histoire, dans un geste faussement négationniste plein d'audace, d'humour et de sérieux. Parce qu'il n'y a rien de plus sérieux que le cinéma et le communisme.
Vers un avenir radieux est en fait l'anti-film réactionnaire par excellence.
Parce qu'il exulte et se laisse porter par une saine nostalgie qui émeut.
Parce qu'il est un porté par la force du collectif et ne fonctionne que lorsqu'il laisse la place à l'horizontalité, à la confiance, à la sérénité, à la danse et au chant, dans des scènes de foule aux accents circassiens et felinniens stimulants.
Parce qu'il incarne en images l'originel et pieu vœu communiste qui met (encore) en marche toute une génération (célébrée dans une jolie scène finale) dont l'honnêteté presque archaïque émeut.
Léger mais profond, réjouissant par sa vitalité et sa liberté de ton, de forme et de propos, Vers un avenir radieux n'est peut-être pas la plus grande œuvre de son auteur.
Mais, en en ayant comme plus rien à foutre (son affiche en forme de parodie de son Journal Intime semble en être la preuve), Moretti respecte ses spectateurs et les honore peut-être plus que jamais.