« Versailles » est un film juste. Juste par son message contrasté sur une société qui n’en finit pas de vomir ses ersatz de cruauté. Pierre Schoeller suggère et s’abstient sur toute facilité. Le portrait dessiné au couteau est d’une intensité bouleversante tout en restant fébrile. A l’image du destin de ses femmes et de ses hommes dont la vie ne tient qu’au degré de courage à affronter l’adversité. Juste, car ici pas de jugement l’humain est au cœur du film. De la mère un peu paumée à l’âpreté de Damien en passant par les quelques acolytes de la rue ou la famille qui refuse de comprendre, tous sont dépeints avec pudeur et force, tous donnent autant de raison de les aimer ou les haïr. Avec comme témoin magnifique le petit Enzo, tiraillé au sens propre comme au sens figuré par ces adultes en mal d’amour et de reconnaissance. La paternité est aussi au cœur de cette œuvre déchirante. Damien ne veut pas reconduire les erreurs subies dans son passé. Il se donne la mission unique de donner à cet enfant la chance qu’il n’ pas eue, ou su saisir…C’est le moment le plus délicat du film, le plus évocateur aussi de la sensibilité exemplaire d’un réalisateur en herbe qui sait allier la désespérance à la poésie. Il offre aussi à Guillaume Depardieu son plus beau rôle. Il apparaît presque décharné, à la limite de l’animalité mais d’une époustouflante beauté et avec un charisme extraordinaire. Il fait de Damien un ange déchu, un homme qui dégage respect et fierté. « Versailles » est un film simple qui vous torture autant qu’il vous attendrit. Un beau reflet de vie, une leçon d’humanité.