Mine de rien, le canadien Cody Calahan commence à se faire une petite réputation dans le milieu du cinéma horrifique via sa boite de production Black Fawn Films qu’il a créée avec Chad Archibald. On leur doit notamment Antisocial, Antisocial 2, The Drownsman, Bite ou encore Let Her Out. Des films solides souvent salués pour leur côté ludique et sophistiqué sur le plan narratif. Calahan revient cette année avec Vicious Fun qui rien que par son pitch a de quoi attiser la curiosité des amateurs de films d’horreur, surtout qu’il se traine une réputation de film bien barré depuis qu’il a tourné dans divers festivals, remportant même le Corbeau d’Or et le Prix du Public lors de la soirée de clôture de la 39ème édition du Festival International du Film Fantastique de Bruxelles (BIFFF). Sa réputation n’est pas usurpée car Vicious fun est sacrément fun.
Sorti directement sur la plateforme Shudder (le ShadowZ américain), Vicious Fun va allier comédie et horreur avec un très bon équilibre, mélangeant humour potache, gore et références avec brio. Cela peut sembler facile de mixer ces deux genres mais au final, ce n’est pas chose aisée de rendre le tout homogène. Beaucoup s’y sont cassés les dents mais Cody Calahan ne va pas tomber dans le piège de l’hommage facile aux années 80 comme c’est souvent le cas aujourd’hui avec cette mode de rendre hommage à l’âge d’or du cinéma horrifique. Des références, il y en a plein, mais le réalisateur les utilise de manière intelligente afin de ne pas tomber dans les clichés dont il se moque. L’originalité du scénario va être d’offrir à la fois un hommage mais aussi un côté parodique, un pastiche, de tous les archétypes du genre slasher. Chaque personnage est à lui tout seul un archétype de tueur célèbre du cinéma. On retrouve le gros costaud affublé d’un masque qui dégomme de la minette à la machette dans des camps d’été ; le calculateur qui va élaborer des plans en 17 étapes pour faire souffrir ses victimes ; le psychopathe qui dévore ses victimes après les avoir assassinées ; la tarée adepte du couteau ; le sournois à l’intelligence rare capable de se faire passer pour n’importe qui ; … Bref, tous les clichés du cinéma d’horreur sont là et ont droit eux aussi à leur moment de doute, à leur moment de réflexion, à leur moment de partage, dans une scène de réunion de psychopathes anonymes qui sera le lancement du film. Car par un pur hasard, un jeune homme un peu couard et naïf, rédacteur dans un magazine horrifique, va se retrouver au milieu de cette réunion et devoir improviser pour survivre. Mais là où certains seraient tombés dans la facilité en mettant en avant les connaissances en cinéma horrifique de leur héros pour s’en sortir, Cody Calahan va prendre tout le monde à contrepied en prenant une direction plus intelligente afin certes de rendre hommage à ce cinéma qu’il semble énormément apprécier, mais surtout afin de réaliser une vraie comédie horrifique qui a ses propres codes.
Cody Calahan l’a dit lui-même dans plusieurs interviews, il est accro aux slashers stéréotypés dont il se moque dans ce film ainsi que de tous les codes, clichés et autres tics qui ont fait le succès, et sans doute la chute, de ce sous-genre. Tout d’abord, il y a l’excellente bande son au synthé qui à elle seule vaut le détour. Mais il va aussi tout faire pour que son film ait des allures 80’s. Visuellement, ça rend vraiment bien, aussi bien au niveau des couleurs que du look des personnages, que ce soit vestimentaire ou bien capillaire. Lors d’un gag à mourir de rire, il va même jusqu’à se moquer gentiment des moustaches typiques de cette époque. De manière générale, c’est toute la partie comédie qui est réussie. Le réalisateur se moque de plein de clichés du genre, mais c’est justement parce qu’il les adore. On dit bien « Qui aime bien châtie bien » non ? Certains personnages, à l’image du trio de policiers, sont tellement crétins, tellement volontairement dans le cliché, qu’ils en deviennent géniaux. L’humour fonctionne à plein tube, générant pas mal de gros fous rires. Tout y passe, des tueurs extrêmement lents mais qui, par on ne se sait quel miracle, rattrapent toujours leur victime ; le coup classique du camp d’été rempli de minettes ; les flics à moustache un peu couillons et bien branleurs ; le cliché du clown, … Mais Calahan en profite aussi pour glisser un petit mot aux cinéastes contemporains préférant provoquer la surprise (les jumpscares si fréquents de nos jours) au détriment du suspense. Son personnage principal est vraiment excellent, interprété par un très bon Evan Marsh (Shazam, Riot Girls) qui lui donne parfaitement vie, avec son bombers rouge rappelant celui de Marty McFly, comme pour nous rappeler : Allez, retour vers le passé les gars ! De manière générale, ce sont tous les personnages qui sont savoureux et il n’y a guère de faux-pas dans Vicious Fun. Les moments gores sont bien gores, gorge transpercée, tripes à l’air, jambe coupée, étranglement au gros intestin ; le film est bien inventif dans ses meurtres, avec des effets spéciaux sans CGI (ou vraiment très peu) ; la mise en scène est maitrisée de bout en bout avec quelques effets visuels (du genre split screen) utilisés sans abus. Non, vraiment, Vicious Fun est une réussite.
Vicious Fun est une comédie horrifique jouissive, provoquant bon nombre de fous rires dans la façon intelligente qu’il a de parodier/rendre hommage aux slashers des années 80. Un délire vraiment fun et un film à voir pour tous les amateurs du genre.
Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com