Donc j’ai finalement vu Videodrome. Je m’attendais a ce que le film ait vieilli, surtout au niveau du propos, vu que ca parle de TV. Et en fait c’est tout l’inverse, je pense que le film a jamais ete aussi actuel, et n’est pas pret d’etre depassé, au contraire.
La facon dont Cronenberg tisse son propos fait qu’il s’applique a toutes les evolutions technologiques en contact avec l’homme et sa psyché. Il marche donc encore mieux de nos jours, avec internet, le metaverse a venir, et bien sur nos smarphones, qui sont de facon evidente devenus une extension de notre corps. Et une partie integrante de notre sexualité en meme temps, a de multiples niveaux.
Donc plus le temps va passer, plus il y a des chances que le propos soit pertinent, vu que plus la technologie avance, plus le corps humain devient un element abstrait dans nos vies. On « delegue » nos deplacements, notre santé, nos relations, notre travail, aux machines, mais que devient notre esprit avec ce corps cybernetique?
Et forcement pour Cronenberg, cela se joue au niveau inconscient, et donc sexuel. Pas pour rien que celle qui incarne Videodrome, Nicky, recherche avant tout le plaisir dans la douleur physique, dans le ressenti de son corps qui lui echappe. On retrouve ici la filiation avec Tsukamoto et avec le recul je me rends compte que Existenz est en fait une sorte de Videodrome 2.
Bien sur le propos est plus sybillin, subtil, et le film couvre de vastes sujets, le transhumanisme, l’addiction, le porno (indirectement), le SM, l’ultra-violence, l’art…mais tout reste coherent.
Sur la forme, Cronenberg nous regale de ses visions tordues, toujours efficaces. Alors oui certains effets ont un peu vieilli, notamment au niveau des fausses tetes. C’est la qu’un leger mix avec du CGI aurait pu etre benefique. Mais dans tous les cas il est essentiel pour le propos que les effets soient majoritairement faits en dur, et il n’y avait pas le choix a l’epoque. Le travail de Rick Baker est toujours remarquable.
Et le tout se fond parfaitement dans une histoire où on ne s’ennuie jamais, un techno-thriller de l’epoque, et aussi avec un James Woods en roue libre comme on l’aime.
Bref, super film, avec un propos très elaboré, tres actuel, et qui interpelle vraiment le spectateur sur son propre devenir. Ne souhaiterait on pas reprendre une partie du controle sur notre vie, sur notre corps, et donc sur notre esprit?