Curieusement, ce Viens chez moi, j'habite chez une copine est aujourd'hui quelque peu oublié. Marche à l'ombre est passé après et semble avoir récolté toute la notoriété, ce qui paraît plutôt injuste. Injuste d'abord parce qu'on assimile ces deux comédies alors qu'elles ne racontent pas tout à fait la même chose. Si dans Marche à l'ombre, Michel Blanc est un personnage névrosé mal dans ses baskets, il est ici un type sans gêne qui tape l'incruste chez son meilleur ami et va l'entraîner dans ses combines les plus foireuses et mettre en péril son couple. Car ici son pote, joué par le toujours impeccable Bernard Giraudeau, est un homme posé, heureux en couple et soucieux d'éviter les ennuis. Il se mordra les doigts de s'être ainsi laissé embringuer dans d'impossibles situations. On est donc loin du portrait des deux copains un peu paumés qui vivent de petits trafics et se retrouvent à dormir dans un squatte. On parle ici de gens de la classe moyenne dont le quotidien est forcément incomparable.
Injuste ensuite parce que le ton de ce Viens chez moi, j'habite chez une copine paraît plus juste. Cette comédie sociale se veut aussi une peinture de son temps et elle se regarde donc aujourd'hui, au-delà de ses situations amusantes, comme un témoignage d'époque qui garde une véritable authenticité. Délestée de la pesante intrigue sentimentale qui viendra alourdir Marche à l'ombre, elle est une comédie tendre sur l'amitié et dresse des portraits qui sont plus aboutis et cohérents.
Ce n'est pas une comédie tordante, on y trouve moins de scènes drôles que dans Marche à l'ombre, mais l'ensemble est plus fin et vise plus juste. Par ailleurs, le personnage de Michel Blanc est ici plus délicieusement insupportable et celui de Bernard Giraudeau plus attachant. Ce n'est pas la comédie du siècle, mais, parfaitement interprétée, elle mérite d'être revue afin d'être mieux considérée.