"Ô flots abracadabrantesques,
Prenez mon cœur, qu’il soit sauvé !"
Viens, je t'emmène est un film surprenant, qui réussit le grand écart entre un humour cocasse, franchement drôle si on est adepte du burlesque, et une toile de fond plutôt inquiétante : prostitution, attentat, djihadisme, conflit avec des jeunes de cités, violence conjugale. C'est clair qu'il y a du lourd mais la comédie l'emporte grâce aux situations imprévues, aux dialogues décalés, et aux personnages hauts en couleur. J'ai adoré le conciliabule entre voisins de palier, au rythme de la lumière de l'escalier qui s'éteint toute les minutes.
Médéric, le personnage principal, illustre parfaitement le film : lui même oscille constamment entre la prostituée au mari jaloux et le jeune SDF qu'il suspecte d'être un terroriste. Un peu naïf, il se laisse dépasser par les situations qu'il provoque et qui l'entrainent de plus en plus vers l'inattendu (voisins hyper vigilants, collègue collante, stage de 3e dans un hôtel de passe), la violence et le drame.
Certes, les personnages sont caricaturaux, mais tous plus complexes qu'il n'y parait de prime abord. Le film use des stéréotypes pour mieux leur tordre le nez.
Scénario improbable - abracadabrantesque (pour reprendre le mot d'Arthur Rimbaud, popularisé par Jacques Chirac) - pas toujours complètement crédible (burlesque oblige) mais qui fonctionne parfaitement, notamment grâce aux seconds rôles qui ont tous du relief.
Si vous êtes sensible à la cocasserie, je recommande vivement. Sinon s'abstenir : le 1er degré est fatal pour apprécier ce film.
(écrit le 6 mars 2022)