Démon misanthrope cherche assistant conciliant.

Adapter une bande dessinée n’est jamais chose aisée, les cases et leur côté si singulier ne s'accommodant pas toujours au réalisme du grand écran. Certains l’ont pourtant réussi, voire même excellemment réussi, du « Astérix : Mission Cléopâtre » d’Alain Chabat avec la bande de Canal + au « Zaï Zaï Zaï Zai » de François Desagnat avec Jean-Paul Rouve qui nous avait fait mourir de rire sans qu’on ait lu le matériau original. Pareil ici avec « Vil et misérable », adaptation de la bande dessinée éponyme du québécois Samuel Cantin, on se lance dans le film sans l’avoir parcourue. Et si le film est moyen et loin d’être exempt de défauts, on a tout de même envie de la découvrir. Il est clair qu’on ne verra pas un long-métrage comme celui-là tous les jours, preuve encore une fois de l’audace du cinéma québécois après l’excellent et mémorable « Vampire humaniste cherche victime consentante » pour rester dans des œuvres complètement à contre-courant. Voilà donc ici une sorte de comédie complètement décalée et irrévérencieuse trempée dans le fantastique et enrobée de bromance. On nage à plein régime dans l’absurde et le loufoque et c’est certains que ce cocktail étonnant ne plaira pas à tout le monde, en laissera beaucoup de marbre voire en agacera d’autres. Mais on ne peut nier l’originalité et la singularité de la proposition.

Commençons par ce qui ne va pas. D’abord, et peu importe le peu de moyens et l’origine littéraire du film, on ne peut pas dire que « Vil et misérable » développe une identité visuelle qu’un tel sujet et univers comme celui-ci autorisaient. C’est très laid formellement. Et comme, de manière un peu plus compréhensible, on a fait le choix de respecter les costumes et décors de la BD à la lettre (donc des déguisements extrêmement low-cost qui ressemblent à ceux de « La Soupe aux choux »!), le tout paraît bien cheap, comme sorti d’une série Z. Ensuite, le film est beaucoup trop long pour ce genre de comédie complètement azimutée. Les blagues les plus courtes sont les meilleures comme le dit l’adage mais là le film approche tout de même les deux heures... C’est beaucoup trop excessif. Enfin, on ne peut pas dire que l’on rit beaucoup, il y a pas mal de tentatives de gags et de détournements, quels qu’ils soient, qui tombent à plat. Les moments gênants sont rares mais le rire franc l’est tout autant.


Il n’empêche, « Vil et misérable » nous fait souvent sourire et on adore voir les délires imaginés par Samuel Cantin prendre vie. La réalité que l’on voit dans le film, avec ses ajustements alternatifs, est très amusante. Du concessionnaire-libraire comme si c’était la norme au trafic de livre usagés en passant par le fait qu’anges et démons soient admis et de notoriété dans la vie de tous les jours, c’est plutôt bien rendu. On va de surprise en surprise, même si toutes ne sont pas réussies. Certains gags valent cependant leur pesant de cacahuètes (les camions en mode poupée gigognes ou l’excellente démone jouée par Anne-Elisabeth Bossé) et cet univers farfelu mais tangible est assez iconoclaste pour satisfaire notre curiosité durant tout le film. La relation entre le démon et ce jeune humain est également bien écrite et incarnée par deux acteurs crédibles, alors que ce n’était pas gagné. D’autres seconds rôles jouent en revanche de manière trop appuyée, dénotant un peu du reste, et on leur accorde trop de temps à l’écran pour rien (le duo de policiers anges ou les collègues de travail notamment). Bref, un résultat en demi-teinte pour un film vraiment peu commun mais dont les nombreux défauts empêchent d’adhérer totalement.


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JorikVesperhaven
6

Créée

le 13 févr. 2025

Critique lue 14 fois

Rémy Fiers

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