"Vincent" est selon moi l'un des films de Burton les plus fou et intéressant. Il fut un temps ou le réalisateur, scénariste, producteur et concept designer était un véritable génies des idées, imposant son style aujourd'hui si reconnu. Il s'agit bien là de son premier film d'animation (court-métrage de 6 minutes dans le cas présent) et non de son premier film tout court comme le voudrait une croyance populaire.
Pour resituer sa carrière en quelques mots, Burton a commencé ses études en illustration avant de se tourner vers le cinéma assez expérimental. Dés ses premiers courts-métrages son style si universellement reconnu s'y fait ressentir. Il suffit de se baser sur son adaptation en cours-métrage de "Hansel et Gretel" en 1983 pour constater très tôt dans sa carrière une personnalité artistique aux influences et au style profondément marqué. A mon sens cette remarque est d'autant plus pertinente quand on parle de "Vicent", sorti alors un an plus tôt.
Sa thématique principal qui suivra presque chaque film de sa filmographie sera le concept de la mort comique. Nous le retrouvons un peu partout déjà dans ce cours-métrage ; Vincent, et Burton par extension, aime imaginer la mort autour de lui. La mort chez le cinéaste n'est que rarement triste ou effrayante. Ici jusque dans l'animation quelque-chose d'amusant se dégage de l'ambiance initialement lugubre du récit et de l'aspect visuel. Comme si la mort ne devait pas être crainte car elle n'est en fait qu'un élément naturel de la vie que Burton décide d'appréhender avec un sourire parfois moqueur, parfois bienveillant.
C'est grandement influencé par le cinéma de genre fantastique et d'épouvante que Burton va tenter de s'imposer tout doucement en tant qu'auteur dés la fin des années 1970, début 1980. Principalement intéressé par les productions de la Hammer (société de production mettant en scène des films fantastique à petit budget avec Dracula et autres créatures de l'épouvante), l'expressionnisme allemand (le caligarisme est souvent référencé visuellement au cours de ses oeuvres) et les Universal Monsters ; Burton possédait un bagage culturel qui allait forcément influencer son art, et par conséquent, son cinéma.
"Vincent" résulte en effet de ces influences si ciblées et particulières. Le scénario du court-métrage est le suivant :
Un jeune garçon adorateur des écrits d'Edgar Allan Poe et des films de Vincent Price semble sombrer peu à peu dans la folie. Price était un célèbre acteur iconique du cinéma fantastiques/horrifique des année 50-60-70 dont Burton était un grand fan. C'est d'ailleurs lui qui prête sa voix au narrateur du récit (en V.O. bien entendu), le tout pour un résultat plaisant auditivement pour le spectateur. Le monologue du narrateur est aidé d'une écriture soignée, portée par un influence évidente et assumée à la plume de Poe. Difficile de faire plus auto-référenciel au sein d'une oeuvre. Le personnage de Vincent est une image de Burton tel qu'il était enfant, mais aussi de lui tel qu'il se voit adulte finalement. Nous y retrouvons les thématiques (la mort comique entre autre), l'influence de l'expressionnisme allemand, ainsi que son iconographie visuelle et sa colorimétrie ultra marquée (et aujourd'hui référencée). Il s'agit de l'une des oeuvres les plus intéressantes pour comprendre le style burtonnien.
Je pense qu'il s'agit probablement de l'une des ses plus grandes oeuvres. Symbolisant tout son univers ainsi que son imagerie en à peine 6 minutes. C'est pour tout cela que "Vincent" représente aujourd'hui pour beaucoup encore l'un des chef d'oeuvre de Tim Burton. Même si le cinéaste semble aujourd'hui s'être égaré sur bien des points, il n'en reste une premier partie de carrière monumentale, lancée selon moi avec ce court-métrage quasiment parfait maîtrisé parfaitement de bout en bout.