"C'est si rare de voir deux femmes, qui plus est soeurs, réalisatrices."
Rare, mais pas impossible. Les femmes réalisatrices, soeurs ou pas, sont existentes mais sous-exposés. Je pense au documentaire Et La femme créa Hollywood des deux soeurs Clara et Julia Kuperberg.
Au moins, Delphine (au scénario) et Muriel Coulin (à la réalisation) se sont déjà fait reconnaître grâce à leur succès précédent**17 filles** (2011).
Une fois encore, elles partent d'une vision documentaire pour apporter leurs point de vue personnels féminins à cette histoire unique. Suite à leur mission en Afghanistan, un groupe de militaire français fait escale à Chypre pour "décompresser" des événements traumatiques de la guerre avant de retourner auprès de leur famille. Aurore et Marine, deux amies d'enfance et militaires, se retrouvent alors face à leurs remords et remettent en question leur dévouement pour l'armée.
Le film parvient avant tout à dénoncer deux points forts : le traitement par l'armée française des soldats sujets aux stress-postraumatiques; la condition des femmes dans l'armée française. Et les deux situations se révèlent problématiques.
Tout d'abord, comment sont réellement prise en charge les soldats souffrant de stress-post traumatiques. Même au milieu d'un décors paradisiaque, on ressent une ambiance malsaine de prison dorée. On est témoin d'une prise à la légère des troubles, au profit d'une fierté patriotique. Des séances en groupes qui ne font qu’attiser les tensions entre ceux qui refusent d'en parler par culpabilité et ceux qui souffrent et implosent. Mais on comprends vite que la plupart des soldats préfèrent enfouir leur peurs que de passer pour des "pleureuses".
J'en viens alors au second point du film, la condition des femmes au sein de l'armée.
Cela se résume à des femmes misent à l'écart, ignorées ou traités comme des choses qui n'ont pas leur place dans cet univers masculin. On retrouve pourtant deux personnages de femmes dominantes dans Aurore (Ariane Labed) et Marine (Soko). Dans leur performances audacieuses, les deux parviennent à élever le film de manière différentes. Dans l'émotion subtile pour Ariane Labed, et plus dans le choc, le combat pour Soko.
Elles tiennent têtes face aux hommes, sexisme oblige, et mènent l'action tout du long. Seule la présence toujours dérangeantes des autres militaires masculins leurs portera défaut.
Jusqu'à la fin, nos deux héroines sont loins d'être vicitimisées et usent autant de la violence et du sexe que les hommes. La manière de filmer les corps nues de ces femmes n'est pour une fois pas hypersexualisé mais réaliste. Rien n'est caché, ni les cicatrices, ni la scène d'orgasme féminin.
Pour les personnages d'Aurore et Marine, la manière de gérer les traumas qu'elles ont vécus se fait progressivement, mais pas moins voilements que leur collègues.
Pourtant tout bascule dans une scène finale de "punition" amère, qui ne fait qu'alimenter nos aprioris et nos craintes sur les relations entres hommes/femmes dans l'armée.
Il n'y as pas de résolution à leur aventure très courte. Au contraire, une remise en question qui laisse plutôt le spectateur en attente.
Loin de pouvoir affirmer avoir détesté ou aimé le film, Il nous laisse réfléchir.