Cela fait quarante ans que Vol au-dessus d’un nid de coucou de Milos Forman a vu le jour, et pourtant, il n’a pris aucune ride ! C’est en 1976, qu’il obtient 5 grands oscars (Meilleur film, meilleur réalisateur (Milos Forman), meilleure actrice (Louise Retcher), meilleur acteur (jack Nicholson) et meilleur scénario (Lawrence Hauben & Bo Goldman). Il faut souligner que Milos Forman, devient ainsi le premier cinéaste non anglo-saxon à remporter l’oscar du meilleur réalisateur.

Si ce long-métrage a connu un si grand succès, c’est bien pour de multiple raisons. Adapté d’un roman de Ken Kesey, Vol au-dessus d’un nid de coucou est un formidable pamphlet traitant de sujets tout aussi différents que liés entre eux : on peut y voir une critique du fonctionnement des hôpitaux psychiatriques au XXème siècle, on peut y lire aussi une mise en scène de l’oppression et du totalitarisme (à savoir que Milos Forman a connu les révolutions du printemps de Prague), ou encore y faire un rapprochement avec les Etats-Unis des années soixante-dix (que ce soit de façon politique, psychologique ou sociale). Les lectures de ce long-métrage sont donc extrêmement nombreuses ce qui permet au spectateur de faire son choix, et, dans tous les cas, il ne s’ennuiera pas ! Il faut noter aussi que la performance des acteurs y est inoubliable. Jack Nicholson interprète à la perfection Mac Murphy, un homme décidant de jouer le fou dans le but de ne pas passer par la « case prison ». Ce anti-héros haut en couleurs, plein d’esprit, combattant et atypique décide alors de résister face à l’impitoyable infirmière Ratched jouée à l’excellence par Louise Retcher. Sa froideur, son autorité, et son absence de sentiment est palpable tout au long du film. Elle est, d’une certaine manière, une dictatrice prônant la normalité aliénante de notre société : toutes les personnes excentriques, originales et anticonformistes sont donc, à ses yeux, des malades mentaux.

Il est intéressant de préciser que Milos Forman a tourné Vol au-dessus d’un nid de coucou dans un réel hôpital psychiatrique, certains patients ont donc participé au tournage soit comme acteurs, soit en aidant les techniciens, ce qui donne une dimension encore plus naturaliste à cette fiction. La mise en scène, elle aussi, tend à rendre cette histoire totalement en adéquation avec la « réalité » des hôpitaux psychiatriques des années 70. Pour ce qui est du décor, la thématique de l’enfermement est omniprésente : barreaux aux fenêtres, grillages, vitres séparant les employés des internés, multitude de portes fermées, décors cliniques, austères et vides… Milos Forman a créé une ambiance où les employés sont aussi vides que les lieux. Seuls les patients apportent de la vie, des émotions et des sentiments face à la caméra. La scène de pêche en bateau, celle du baseball ou encore la scène finale regorgent d’humanité et de beauté. Les patients, libérés de l’hôpital psychiatrique deviennent normaux, échangent, s’expriment à nouveau, oublient le jugement de Ratched. En somme, ils réapprennent à vivre. De ce fait, le spectateur s’identifie, tente de les comprendre, et annihile la notion de jugement – principal but moral du film-. Notons aussi que Ratched et Mac Murphy se battent pour obtenir l’attention et le respect des patients. Alors que les mouvements de caméra sont très rares, seules les prises de pouvoir sont filmées en travelling, panorama ou zoom. Ainsi, on suit à la perfection les deux personnages principaux dans leurs victoires comme dans leurs défaites.

Rien n’est laissé au hasard, que ce soit les cadrages, les échelles de plan, les mouvements, le décor, les actions, le choix des lieux, l’apparition de la musique, les déplacements des personnages… Tout a un sens. Vol au-dessus d’un nid de coucou a un certain cachet aussi bien dans le fond que dans la forme ; le réalisateur réussit à faire rire, à émouvoir et à nous remettre en question. C’est un chef-d’œuvre intemporel et mémorable. Qui plus est, son thème principal est toujours d’actualité, avec par exemple la sortie récemment de A la folie, un documentaire sur les hôpitaux psychiatriques en Chine réalisé par Wang Bing. Vol au-dessus d’un nid de coucou est un long-métrage culte déjà ancré dans l’histoire du cinéma qui en inspirera plus d’un.
Sophie_Chaffaut
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le 14 mars 2015

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Sophie Chaffaut

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