Il y a des films qui nous touchent beaucoup plus que d'autres. Il y a des acteurs qui nous marquent beaucoup plus que d'autres. Il y a des scènes qui nous émeuvent beaucoup plus que d'autres. Aimer un film, c'est toujours très subjectif. Je n'irai donc pas par quatre chemins : "Vol au-dessus d'un nid de coucou", c'est mon film n°1. Ça vous plait, ça vous plait pas, c'est pareil !
Ce film signé Miloš Forman, sorti en 1975, nous fait suivre quelques jours dans la vie de Randall McMurphy (Jack Nicholson), interné dans un hôpital psychiatrique pour échapper à la prison. Confronté à l'autoritaire Miss Ratched (Louise Fletcher), infirmière en chef, McMurphy comprend vite que pour soigner les patients, c'est une autre méthode qu'il faut adopter. McMurphy va donc casser les règles, à ses risques et périls.
Un des nombreux intérêts du film est qu'il révèle le quotidien de patients internés dans un institut spécialisé. Par cette mise en lumière, le réalisateur déstigmatise une catégorie de la population souvent mise à l'écart : les handicapés mentaux. Mieux encore, le long-métrage dénonce les pratiques violentes utilisées dans les hôpitaux psychiatriques, telle la lobotomie. "Vol au-dessus d'un nid de coucou" s'attaque donc à un sujet grave et c'est en instaurant une dualité entre comédie et drame que le sujet est rendu accessible. Pour notre plus grand bonheur de cinéphile ...
Pour ce faire, l'écriture du personnage principal est particulièrement soignée : McMurphy, c'est un peu le genre de mec qu'on aimerait tous avoir dans son entourage, non ? Il fait des blagues à tout va, il dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas, il n'a honte de rien. Bon, c'est aussi un petit voyou ... accessoirement il a été mis en prison pour viol ... le personnage est donc plus complexe qu'il n'y parait. Pour lui donner vie, c'est un certain Jack Nicholson qui a été choisi. Ses mimiques, sa gestuelle, son intonation, tout est tellement travaillé qu'il arrive à se glisser aisément dans la peau de son personnage, nous faisons oublier l'acteur qu'il est. Le résultat est bluffant parce que l'acteur parait imprégné par son rôle.
Les autres comédiens ne sont pas en reste : Louise Fletcher, cheveux d'ange et yeux bleus, est physiquement en contradiction avec l'image habituelle de la tortionnaire. Ce décalage, vraiment flippant, rend le personnage encore plus inquiétant. A noter aussi la présence des acteurs Christopher Lloyd, Danny DeVito et Brad Dourif dans le rôle de patients de l'hôpital. Mais pour moi, c'est surtout Will Sampson dans son rôle de Chef qui se démarque comme second rôle. Son physique imposant (plus de 2 mètres) déboite avec le caractère paisible du personnage (à la manière de Ratched). Tout ça pour dire quoi ?
"Vol au-dessus d'un nid de coucou" est une œuvre à l'encontre des préjugés. C'est un film qui critique les abus de pouvoir et les règles absurdes. Je parlais justement plus haut du quotidien des patients mis en lumière grâce à ce film. Parallèlement, c'est donc une critique de l'organisation bureaucratique de l'hôpital qui est mise en avant. Ratched applique de manière procédurière des méthodes antiques sans jamais remettre en question leur efficacité. Il est aisé de mettre en perspective de telles méthodes de travail rigides dans nombre d'entreprises encore aujourd'hui. On peut même pousser l'analyse plus loin en disant que le film est une métaphore des populations brimées par les dictatures.
Autant vous dire qu'avec un tel sujet, un certain nombre de scènes sont choquantes. Rien d'étonnant donc à trouver dans ce film une violence physique souvent présente, mais surtout une violence psychologique savamment distillée. Une citation qui illustre bien l'incompétence de Ratched est la suivante : The best thing we can do is go on with our daily routine.
Mais le film n'est pas qu'un tableau noir d'un univers apriori repoussant. C'est aussi une comédie qui donne la joie de vivre. Pour illustrer ce propos, on peut citer la scène du match de base-ball ou bien celle de la partie de pêche. Le film possède donc un autre mérite, celui de nous amener à réfléchir sur la notion de liberté. J'en reviens donc à mon titre : qui est le plus fou ? Celui qui applique les règles sans réfléchir pour entrer dans le carcan de la normalité ? Ou bien celui qui s'en affranchit pour vivre sans contrainte ? A vous de me donner votre réponse. Il est clair qu'elle n'est pas aussi simple qu'un oui ou un non ...
Un must-see !