Quel feu d'artifice !
Moins réputé ou connu que « L’extravagant Mr. Deeds » « Arsenic et vieilles dentelles » ou « Horizons perdus » pour n’en citer que trois, « Vous ne l’emporterez pas avec vous » est mon Capra...
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le 6 mai 2013
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12
Deux mondes, deux familles, deux visions de la vie diamétralement opposées. L'une s'épanouit grâce à la solidarité et à la joie, l'autre grâce à l'argent. Les Vanderhof vivent entre eux, papy, mamie et petits enfants réunis et se soutiennent dans une précarité toute relative ; ils vivent convenablement. Les Kirby sont plus froids, moins éloquents, et vivent dans l'aisance grâce à la fortune du père banquier. Les deux familles vont se rencontrer à la suite d'un long batifolage entre Alice, petite fille du vieux Vanderhof et Tony, le fils Kirby. Ce sont deux univers qui vont se percuter et offrir des situations cocasses, sous le regard très humain du génial Frank Capra...
Le message est clair et net, et il suivra le spectateur du début à la fin. Si c'est la force du film que de jouer avec cette expression pour cristalliser les relations entre les deux familles, c'est aussi ce qui empêche au récit de prendre toute son ampleur. L'argent ne fait pas le bonheur, et il n'y contribue même pas. J'aurais qualifié ce film de pompe à manichéisme géant si je ne connaissais pas Frank Capra. Heureusement, je lui laisse le bénéfice du doute ! Si le rapport à l'argent semble si désarticulé dans le film, c'est pour mieux mettre en relief les valeurs de l'être humain et notamment faire ressortir ce qu'il y a de mieux en nous. Et quoi de mieux que l'argent pour dénoter avec les qualités immatérielles de notre chère espèce ? Capra adore confronter les idéologies, faire évoluer ses personnages et leur faire prendre conscience, amener ses esprits parfois très rugueux à la plénitude et pourchasser des principes dont ils n'imaginaient même pas l'existence. Derrière cette romance se cache une volonté incorrigible de fendre les carcans sociétaux dans lesquels nous baignons, nous privant de la richesse des autres. C'est gentil à lui.
Vous ne l'emporterez pas avec vous se divise en trois grands actes. La découverte, le conflit et l'acceptation. Avoir un happy end dans ce genre de beuverie semble irrémédiable. Pourquoi servir la soupe au bonheur durant deux heures pour finalement nous dire qu'il faut être riche pour être épanoui ? Ca n'aurait pas de sens. Si je fais le parallèle entre le film et une pièce de théâtre, c'est parce qu'il en reprend certains codes. Les lieux changent très peu, tout d'abord. Ils permettent de déstabiliser les personnages ou d'effectuer certains running-gags (comme celui du fauteuil notamment). Les trois parties du film sont toujours très drôles et animées. Les dialogues sont touchants et bien menés, mais ce qui frappe encore plus ce sont les visages des acteurs. Ils sont les vecteurs de complicité ou, parfois, de méprise. James Stewart est le roi incontesté des petites moues drôlissimes qui nous mettent nous, spectateurs, dans la confidence. Les personnages sont tous très caricaturaux, entrent et sortent du cadre, ont tous un but bien précis et des phrases souvent concises qui alimentent l’esbroufe. Une flopée de grands gestes en tout genre.
Chez vous, on ne fait que ce qu'on veut ! Tony (James Stewart)
Entre la danseuse délurée interprétée par la belle Ann Miller ou le domestique qui dresse la liste de courses, il y a une alchimie théâtrale très sympathique à regarder et à ressentir, surtout. Ils se donnent tous la réplique et campent des rôles de composition en or massif. Le beau James Stewart, peut-être moins à l'image que d’accoutumée, nous sort tout son attirail pour nous chatoyer les oreilles - et les yeux, aussi. Il fait le lien entre les deux familles et apporte de la légèreté. C'est simple, on ne peut que l'aimer, ce gendre idéal. Jean Arthur, que je ne connaissais pas, me laisse un peu pantois. Si elle manie parfaitement l'humilité et le caractère de sa caste et la douceur d'une femme conciliante, son interprétation est un peu en dessous des autres, et je dois vous avouer que sa voix nasillarde n'arrange rien. Elle n'est pas déplaisante, ni dans sa prestance, ni dans son jeu, mais elle me laisse une impression d'inconstance.
Un très bon Capra, qui se concentre sur les thèmes dont il a l'habitude avec une pléiade d'acteurs et un humour passe-partout. La remise en question des personnages est un peu gauche mais c'est bien peu de choses face à l'excellente prestation des acteurs présents dans le film. Je le recommande vivement, et m'en vais de ce pas approfondir sa filmographie à la recherche de la prochaine comédie qui bouleversera mon top 10 !
Je viens de faire la découverte du siècle. Je ne vais jamais m'en remettre. Je suis tombé sous le charme de Ann Miller, dont je vous parlais quelques lignes plus haut. Et il se trouve que je la connais plutôt bien puisqu'elle joue... Coco, dans Mulholland Drive. Je suis tombé amoureux de Coco de Mulholland Drive. Je sens mes jambes tressaillir et mon cœur brûler de honte. Je vais noyer ma peine en écumant tous les bars de la ville, je me sens trahi ! Je me sens sali !
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Je voulais faire rimer 2015 avec un mot en inze mais il n'y a que quinze donc du coup ça n'a aucun sens, sinon c'est une liste sur mes films vus cette année. - 365 films vus et Sous le ciel de Sansa : Frank Capra
Créée
le 29 mars 2015
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